L’échec en chiffres
Les chiffres publiés avant-hier par l’Office national des statistiques sur l’industrie nationale donnent froid dans le dos. A part quelques secteurs, qu’on peut compter sur les doigts d’une seule main, l’agroalimentaire, les mines et les industries chimiques, l’économie nationale n’arrive toujours pas à décoller. Bien au contraire, si elle ne stagne pas, elle recule. Au grand dam des thuriféraires qui s’égosillent à vanter «les réalisations» des 20 dernières années. Plus que ce démenti formel et sans appel apporté, qui plus est par un organisme public, les données de l’ONS démontrent pour la énième fois que l’avenir de la collectivité nationale dépend quasi totalement des revenus provenant des hydrocarbures. Une rente aléatoire dont on n’a pas la maîtrise et qui fluctue selon les conjonctures édictées par l’économie mondiale et la géopolitique. Tous les facteurs qui pouvaient nous épargner cette dangereuse dépendance et que maîtrisent toutes les nations développées, ainsi que les nouvelles puissances économiques qui émergent, nous échappent. Ce sont des facteurs dans lesquels il n’y a pas eu d’investissement : la connaissance, la bonne gouvernance, la liberté et la transparence. Les Algériens, ou précisément ceux qui s’imposent à eux, à la tête du pays, n’ont rien fait pour que l’Algérie ait emprise sur son destin. Si les prix du pétrole resteraient en l’état et les dépenses à leur niveau actuel, on serait une nouvelle fois obligé de recourir à l’endettement extérieur, avec tout ce que cela comporte comme sacrifices sociaux et risque d’instabilité. Le pays a déjà eu à expérimenter les exigences du FMI et de la Banque mondiale. Qu’est-ce qui a fait que nous en soyons là aujourd’hui, nous débattant dans une inextricable crise économique ? En 2017, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, l’avouait : nous n’avions pas de quoi payer les salaires, car il n’y avait dans les caisses que 50 milliards de dinars. En 2018, ce sont les pensions de retraite que la CNR était incapable de verser. En un mot : on était au bord de la banqueroute. Alors qu’avons-nous produit, réellement, durant 20 ans ? Rien qui pouvait mettre le pays à l’abri des turbulences que connaît le monde d’aujourd’hui. Contrairement à l’espoir qu’il a suscité à ses débuts, le système mis en place par le chef de l’Etat en exercice n’a été capable en réalité de réformer ni l’économie ni la politique. Il a enfanté d’une entité opaque, non identifiable, mais ayant le monopole sur le levier financier et économique. Une entité n’obéissant qu’à ses propres règles, confondant entre la prospérité de l’oligarchie au pouvoir et le développement du pays. Aucun expert en économie ne peut aujourd’hui mettre un nom ou un concept sur les politiques économiques poursuivies depuis 1999. Quel crédit peut avoir aujourd’hui un «pouvoir» qui empêche les investissements, un gouvernement qui prétend lancer pas moins de 7 usines de construction automobile pratiquement avec tous les concessionnaires de véhicules présents en Algérie ? Quelle confiance peut susciter vis-à-vis des partenaires étrangers un pays qui connaît une incroyable instabilité du dispositif de loi qui encadre l’économie nationale ? Ce n’est pas pour rien que l’Algérie figure parmi les pays où il n’est pas bon entreprendre, où le climat des affaires est l’un des plus mauvais au monde.