Washington appelle les Arabes à créer leur «OTAN»
A Abu Dhabi, le chef de la diplomatie américaine a reconnu que le processus de réconciliation entre ces pays «est compliqué à mettre sur pied». Il s’agit d’«un accord complexe entre plusieurs nations, auxquelles on demande des engagements significatifs,
mais je pense qu’il est possible d’avancer».
Entamée le 8 janvier à Amman, la tournée du secrétaire d’Etat américain au Moyen-Orient, Mike Pompeo, s’est achevée hier à Oman. Ce périple intervient, entre autres, pour rassurer les alliés régionaux et occidentaux sur l’implication des Etats-Unis en Syrie, après l’annonce le 19 décembre du président américain, Donald Trump, du retrait de leurs 2000 soldats déployés dans ce pays. Alliance destinée à combattre dans le cadre d’une coalition, le groupe Etat islamique (EI), une non moins importante est évoquée à cette occasion.
Le secrétaire d’Etat américain a abordé un autre sujet, à savoir le projet d’«Alliance stratégique du Moyen-Orient», une sorte d’«OTAN arabe» à l’effet d’unir les alliés du Golfe ainsi que l’Egypte et la Jordanie contre l’Iran. La mission s’avère difficile.
L’Arabie Saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis et l’Egypte ont rompu en juin 2017 leurs relations diplomatiques avec le Qatar et lui ont imposé un blocus. Ils accusent Doha de liens avec des groupes islamistes radicaux et l’Iran, ennemi commun des autres pays de la région. Accusations rejetées par le Qatar. Ce qui sape l’initiative américaine. Ainsi, faudrait-il travailler pour la réconciliation de Doha avec ses voisins du Golfe, à commencer par l’Arabie Saoudite.
Au Qatar, où il a rencontré l’émir cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, le chef de la diplomatie américaine a tenté dimanche d’oeuvrer pour la réconciliation de Doha avec Riyad, deux pays membres du Conseil de la coopération du Golfe (CCG). «Aujourd’hui, j’ai souligné l’importance de l’unité parmi les membres du CCG. Le président Trump et moi-même pensons tous deux que la dispute a duré trop longtemps», a déclaré le chef de la diplomatie américaine, lors d’une conférence de presse avec son homologue qatari, cheikh Mohammed Ben Abderrahmane Al Thani, relayé par l’AFP. «Nous sommes plus puissants quand nous travaillons ensemble» face aux «défis communs», à commencer par l’Iran, a-t-il soutenu.
«DÉPASSER LES VIEILLES RIVALITÉS»
Plus tard, Mike Pompeo, qui s’exprimait à l’ambassade des Etats-Unis à Doha, a constaté qu’il n’était «pas clair du tout si la querelle» du Golfe «était plus proche d’un règlement aujourd’hui, qu’elle ne l’était hier. Et je le regrette». Au Caire, jeudi, il a déjà exhorté les pays du MoyenOrient à «dépasser les vieilles rivalités». Samedi à Abu Dhabi, le chef de la diplomatie américaine a reconnu que le processus de réconciliation entre ces pays «est compliqué à mettre sur pied». Il s’agit d’«un accord complexe entre plusieurs nations, auxquelles on demande des engagements significatifs, mais je pense qu’il est possible d’avancer». Mais les tentatives de médiation sont dans l’impasse, comme en témoigne la démission le 8 janvier de l’émissaire américain Anthony Zinni. Le général à la retraite, qui a repris du service à l’été 2017 pour le département d’Etat, a expliqué à la chaîne américaine CBS avoir renoncé à sa mission «en raison de l’absence de volonté des dirigeants régionaux d’accepter une médiation viable que nous avons proposé de mener ou de faciliter». «La mission du général Zinni était d’aider à introduire le concept d’Alliance stratégique du Moyen-Orient et de commencer à en parler avec les dirigeants de la région. Cela est bien en cours grâce à ses efforts», a réagi, un porte-parole du département d’Etat, Robert Palladino, en marge de la visite de Mike Pompeo à Amman. Or, selon CBS, Anthony Zinni a estimé aussi que cette mission est superflue, d’autres hauts responsables de l’administration Trump étant déjà chargés de promouvoir cette nouvelle alliance. L’administration «va continuer de mener à bien cette mission», a dit Robert Palladino. «Le général Zinni nous a dit qu’il restait à disposition en cas de besoin», a ajouté le porteparole en remerciant l’émissaire démissionnaire pour ses services. Le secrétaire d’Etat américain n’ira pas au Koweït comme prévu aujourd’hui, étant obligé de rentrer aux Etats-Unis pour assister à des funérailles familiales, a indiqué hier le porte-parole américain, Robert Palladino, à Riyad. Avant le Golfe, le chef de la diplomatie américaine s’est rendu en Jordanie, en Irak et en Egypte.