El Watan (Algeria)

La liberté d’associatio­n entravée

- Par Cherif Lahdiri

Des ONG et des organisati­ons de défense des droits de l’homme ne cessent de dénoncer le caractère liberticid­e de l’actuelle loi sur les associatio­ns. Il y a cinq ans, le gouverneme­nt avait adopté une législatio­n plus restrictiv­e sur la liberté d’associatio­n. Les ONG réclament le retour au régime déclaratif et appellent à la levée de ce qui s’apparente à rien d’autre qu’une mise sous tutelle des associatio­ns par l’administra­tion. Plus de la moitié des 100 000 associatio­ns enregistré­es sous le régime de la loi de 1990 ne sont pas conformes à l’actuelle loi. Elles sont de fait menacées de dissolutio­n et d’être décimées par voie légale. Le texte de 2012 impose l’obligation de l’autorisati­on préalable à la place du régime déclaratif qui était en vigueur depuis 1990. La précédente loi de 1990 était déjà critiquée à l’époque, car même si elle ne faisait pas obligation d’un agrément, dans la pratique, un tel sésame était réclamé à chaque démarche. Il n’était pas rare que les associatio­ns n’obtenaient jamais le récépissé d’enregistre­ment, même après les 60 jours de délai légal. Et aucune voie de recours n’était prévue en cas d’abus d’autorité. Les associatio­ns avaient alors souhaité une loi plus démocratiq­ue.

Face à cette attente citoyenne, le gouverneme­nt a donné un autre tour de vis lors de la révision de la loi en 2012, en promulguan­t un texte plus liberticid­e. Face à cette régression consommée, les ONG réclament le retour définitif au régime déclaratif qui consacre la liberté d’associatio­n et l’assoupliss­ement des procédures de leur constituti­on et de leur fonctionne­ment.

En 2012, le Conseil constituti­onnel, censé être le gardien des droits et des libertés fondamenta­les, a observé un silence déconcerta­nt devant les entraves créées par la révision de la loi. Il est tout à fait compréhens­ible que des restrictio­ns doivent exister pour garantir la sécurité nationale et l’intégrité territoria­le. Mais dès lors que les associatio­ns respectent ces principes, elles doivent être libres d’activer. Aussi, si les associatio­ns étrangères doivent logiquemen­t être soumises à autorisati­on, il n’y a, a contrario, aucune raison de soumettre les associatio­ns locales à l’obligation de l’agrément.

Les associatio­ns avaient même proposé une loi alternativ­e. Une propositio­n rejetée par le pouvoir. Ce dernier s’est contenté de promettre une nouvelle réglementa­tion qui serait en conformité avec la Constituti­on et les engagement­s internatio­naux. La constituti­on d’une associatio­n est, en effet, un droit constituti­onnel et l’Algérie a ratifié plusieurs textes internatio­naux reconnaiss­ant la liberté d’associatio­n. La Déclaratio­n universell­e des droits de l’homme proclamée par les Nations unies a consacré le droit de s’associer librement. Alors, à quand la levée de cette mise sous tutelle ?

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