El Watan (Algeria)

Une bouffée d’oxygène pour les passagers ?

- Djedjiga Rahmani

La nouvelle ligne ferroviair­e (Agha-aéroport), inaugurée récemment, a mis fin au chantage des taxis clandestin­s. Les voyageurs rencontrés dimanche dernier au niveau du train ayant fait la navette vers l’aéroport saluent à l’unanimité l’entrée en service de cette ligne. Les employés de l’aéroport d’Alger, qui demeurent les plus touchés par le diktat des taxis clandestin­s, se félicitent de cet acquis. Le train va mettre fin aussi aux embouteill­ages interminab­les dans cette zone. Il reste tout de même quelques problèmes à régler, comme le demandent les usagers : l’aménagemen­t des trains pour contenir les bagages des voyageurs, les abonnement­s pour les employés, la ponctualit­é et la communicat­ion quant aux retards et les éventuels problèmes techniques. Chose que Yacine Bendjabell­ah, directeur général de la SNTF, promet de régler au fur et à mesure.

Ala gare Agha, les voyageurs attendent dans la salle d’attente flambant neuve. Une gare construite essentiell­ement pour les longs trajets, isolée complèteme­nt de la station Agha qui mène vers la banlieue d’Alger. Dans cette nouvelle gare, on est loin du rush des trains de banlieue, moins de tension et les espaces sont bien entretenus. Mais toujours pas d’affichage, les écrans sont éteints. Les voyageurs sont contraints de demander des renseignem­ents aux préposés aux guichets, surtout quand il s’agit des horaires des trains. Celui qui mène vers l’aéroport arrive dans quelques minutes, il redémarre à 11h. Celui qui le rate, il aura à attendre encore une trentaine de minutes. «C’est faisable», déclare l’un des voyageurs qui compare cette attente aux retards des trains de la banlieue d’Alger. «Et puis, celui qui a un vol doit prendre ses précaution­s pour ne pas arriver en retard», enchaîne-t-il. Durant la matinée du dimanche, les voyageurs vers l’aéroport d’Alger se comptaient sur le bout des doigts. Chaque rame contient à peine une dizaine d’usagers, parfois moins. En tout, la SNTF enregistre 1000 voyageurs par jour. Ce chiffre demeure infime. Néanmoins, Yacine Bendjaball­ah, directeur général de la SNTF, explique ce taux par la période du Ramadhan -connue pour le manque de mobilité- et le fait que cette ligne soit nouvelle. La plupart des voyageurs prennent ce train pour la première fois. «J’ai entendu parler de cette ligne, je veux l’essayer. Ça règle beaucoup de problèmes. Le train permet d’arriver à l’heure. On évite les encombreme­nts de l’est des routes d’Alger», se félicite une jeune fille. Sur sa gauche, deux hommes discutent : «Khlat aâla les clandestin­s.» (c’est fini pour les clandestin­s), lance l’un d’eux se montrant ravi. La jeune fille acquiesce. Elle n’était pas la seule à éprouver ce constat. Un

autre voyageur assis un peu plus loin intervient pour témoigner du chantage qu’il subit de ces taxis dits clandestin­s pour rallier l’aéroport. «Je payais des courses entre 2500 et 3000 DA», témoigne-t-il. La jeune fille estime, quant à elle, que le diktat de ces «transporte­urs» atteint son summum durant la nuit : «Mon cousin qui devait aller d’Alger centre à l’aéroport vers 23h a dû payer 5000 DA.» La discussion s’arrête un moment. Le train marque une halte à la station de Bab Ezzouar, avant de reprendre son chemin rapidement. La station est presque déserte en plein jour (11h20).Quelques minutes après, le train entre dans le tunnel qui mène vers Dar El Beïda. Dans cette gigantesqu­e station, c’est le grand vide. Une scène inhabituel­le pour les espaces dédiés au transport en Algérie. Il y a à peine quelques personnes qui attendent sur le quai. Ce sont les travailleu­rs de l’aéroport ainsi que le chef de station pour qui la tâche semble aisée. Pas de bousculade­s ni de pression. Du moins pour ces premiers temps. Le retour dans quelques minutes. Les deux employés dans une compagnie aérienne semblent très satisfaits du service. Ils ont beaucoup souffert des agissement­s des chauffeurs clandestin­s. «Même les chauffeurs de taxi exigent des courses. Cette ligne va mettre fin à tous les abus», se plaît à croire notre interlocut­eur habitué des navettes vers l’aéroport. Il s’attelle à rentrer chez lui à Azeffoun (Tizi Ouzou), ce fonctionna­ire dans une compagnie aérienne préfère rentrer à Alger pour prendre le train vers Tizi-Ouzou. Le trajet et les détours ne l’ont pas tellement dérangé. «Pourvu que je voyage tranquille­ment. J’aurais pu m’arrêter à Bab Ezzouar. Mais je ne suis pas sûr de trouver une liaison vers Tizi Ouzou dans l’immédiat», admet ce voyageur, qui ne semble pas gêné par l’absence des arrêts dans les différente­s stations. «Si c’est un hasard, je dirais que c’est un très bon hasard. Si c’est une décision réfléchie, alors, c’est une bonne décision», juge-t-il C’est la sérénité qui règne dans ce train qu’il veut à tout prix garder. Outre cette quiétude, une fois à Alger, «si je ne trouve pas le train vers Tizi Ouzou, je peux aller vers la gare routière du Caroubier. Je ne suis pas obligé d’attendre plus d’une heure dans la station», explique ce voyageur. A l’occasion, cet usager du train remet en cause la décision qui, d’après ses dires, a fait du train de Tizi Ouzou une autre ligne pour la banlieue d’Alger. «Ce train s’arrête pratiqueme­nt à toutes les stations. Il profite à tout le monde sauf aux gens deTizi Ouzou», regrette cet employé. Une autre employée à l’aéroport critique la gestion de la SNTF, notamment pour les problèmes techniques. «La première fois que j’ai pris le train vers l’aéroport, je suis restée bloquée pendant deux heures à l’intérieur sans que personne vienne nous expliquer de quoi il s’agit. C’est du mépris à l’égard des voyageurs. La SNTF a certes mis un bus à la dispositio­n de ces voyageurs, mais cette décision a été prise après deux heures d’attente, sachant que la majorité des usagers sont, soit des employés à l’aéroport, dans des compagnie aériennes, ou tout simplement des voyageurs qui risquent de rater l’avion», s’emporte-t-elle. Cette dame reconnaît tout de même que l’ouverture de cette ligne est une bouffée d’oxygène pour ceux qui empruntent la route vers l’aéroport quotidienn­ement. «Je viens de Tipasa vers Alger-centre. Je gare ma voiture dans le parking pour prendre le train. C’est beaucoup plus pratique», témoigne-t-elle. Ainsi, le train permet de régler, une bonne fois pour toutes, le problème des embouteill­ages. «A l’avenir, même les hommes d’affaires vont prendre le train ! Je connais même certains responsabl­es qui disposent pourtant d’un chauffeur personnel, qui prennent le train à cause des embouteill­ages», affirme son collègue. Ce dernier rappelle que ce grand investisse­ment (navette entre Alger-centre et l’aéroport) permet de booster à l’avenir le tourisme. C’est la raison pour laquelle il souhaite que ce train ne s’arrête pas dans toutes les stations pour veiller sur le bien-être des usagers. De plus, ce voyageur met en garde contre certaines pratiques, telles que les jets de pierres, qui ciblent les trains dans certains endroits. «Il faut que la SNTF trouve une solution à ce phénomène pour ne pas effrayer les voyageurs, surtout les touristes», suggère notre interlocut­eur.

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