AFFAIRE KHASHOGGI : L’OMBRE DE MBS
Quand le livre de Christine Ockrent est sorti, Jamal Khashoggi n’avait pas encore subi le sort atroce qui fut le sien, lui qui sera décapité début octobre 2018 dans le consulat d’Arabie Saoudite à Istanbul. L’affaire n’y est donc pas évoquée. Il n’empêche que la journaliste le cite dans plusieurs passages.
Par exemple, page 112, elle écrit : «La presse écrite est muselée – l’un des meilleurs éditorialistes du pays, qui a plusieurs fois dénoncé l’intransigeance du système après avoir conseillé quelquesuns de ses potentats, a préféré s’exiler aux Etats-Unis et collabore aujourd’hui à différents journaux anglo-saxons, dont le Washington Post.» Dans un autre passage, page 137, elle évoque la réponse
cinglante de Khashoggi à une déclaration de MBS faite à CBS News où il affirme : «La vraie Arabie Saoudite c’était celle des années 1960, 1970. Nous menions une vie normale, comme dans les autres pays du Golfe. Les femmes conduisaient, elles pouvaient travailler partout. Il y avait des cinémas. Nous étions un pays normal, se développant comme les autres. Je dis qu’il faut ramener l’Arabie Saoudite à un islam modéré.» Et Jamal Khashoggi de lui répondre sèchement dans un papier paru
dans le Washington Post : «J’étais adolescent dans les années 1970. Les femmes ne conduisaient pas de voitures. Il n’y avait pas de cinémas – parfois une projection en plein air, sur un mur, et contre un pourboire, l’organisateur nous prévenait de la descente de la police religieuse. En 1977, une jeune princesse de 19 ans qui tentait de fuir le pays a été exécutée avec son amant. C’est à partir de ce moment-là que les femmes n’ont plus eu le droit de voyager sans tuteur. MBS tente d’imposer une nouvelle version de l’histoire récente qui absout le pouvoir de toute complicité avec l’application stricte du puritanisme wahhabite. Simplement, ce n’est pas vrai.» Christine Ockrent a eu par la suite
à commenter cette sordide affaire comme dans cet entretien accordé au magazine français Le Point (édition du 19 octobre 2017) dans lequel elle estime que le «meurtre de Jamal Khashoggi porte la
marque de MBS».