Frémissement
Le coup de tonnerre qui a retenti dimanche au tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, suite à la relaxe surprenante requise par le procureur de la République en faveur d’un groupe de détenus du hirak, suivie d’un plaidoyer politique en bonne et due forme pour l’indépendance de la justice et à la gloire du mouvement populaire du 22 Février, révèle-t-il de l’existence d’un embryon de hirak au sein de la justice ? Dans quelques jours, le mouvement bouclera son premier anniversaire. Le temps d’un bilan pour évaluer les étapes franchies par la Révolution du sourire dans la voie du démantèlement de l’ancien système et le passage à un nouveau mode de gouvernance fondé sur l’Etat de droit, la démocratie et le respect de la volonté populaire. L’an I de la Révolution du sourire sera aussi pour les activistes du mouvement populaire une opportunité pour rappeler au pouvoir d’avant et après l’élection du 12 décembre les promesses et les engagements non tenus pour «accompagner» le hirak dans sa marche résolue vers un nouveau destin pour l’Algérie. En guise d’accompagnement, force est malheureusement de constater, à la faveur des dures péripéties vécues par le mouvement, que l’idylle proclamée n’aura été qu’un mirage durant la période de succession à Bouteflika et que la main tendue par le nouveau président, Abdelmadjid Tebboune, apparaît tout autant insaisissable. L’explosion de joie, émotion caractéristique des événements marquants de l’histoire des peuples qui avaient empli la salle d’audience du tribunal de Sidi M’hamed ce dimanche, après le coup d’éclat (de sang) du procureur de la République, illustre parfaitement cette soif des Algériens d’une justice au service du citoyen et non de castes et de clans qui se disputent le pouvoir.
Quelques phrases ciblées puisées d’une conscience meurtrie par les événements que vit le pays et des lendemains difficiles qui s’annoncent et voilà que l’impossible se réalise sous les yeux médusés des citoyens qui n’en croyaient pas leurs oreilles habituées aux réquisitoires froids et toujours à charge dans nos palais de justice. A une petite échelle, individuelle, la preuve a été donnée que la réconciliation entre la justice et la société est possible et envisageable dès lors que le dévouement pour l'intérêt supérieur du pays prime sur la course aux postes et aux privilèges qui a généré tous les maux dont souffre l’Algérie et créé une caste de fonctionnaires corrompus, dociles et malléables à merci. Vingt-quatre heures auparavant, la chancellerie a vécu une journée folle et riche en événements à la suite de l’instruction émanant de l’inspecteur général de la justice adressée aux juges leur demandant de dénoncer, sous le couvert de l’anonymat, les jugements entachés d’irrégularités. Le fonctionnaire-justicier a vite été recadré par sa hiérarchie, qui a livré au hachoir son instruction brûlot. Bien que loin d’exprimer l’existence d’un courant réformateur en gestation au sein des institutions et des appareils de l’Etat, ces faits recoupés et croisés ne renseignent pas moins sur un état d’esprit nouveau, d’insoumission, frondeur qui règne dans des secteurs dits de souveraineté. Des secteurs où il est formellement interdit d'émettre une opinion, encore moins de contester ou de remettre en cause l’ordre établi.