El Watan (Algeria)

«Face au risque de la Covid, il vaut mieux être maximalist­e que de passer à côté»

Pr ASSIA BENSALEM. Médecin-chef du service d’oncologie médicale à l’hôpital de Didouche Mourad (Constantin­e)

- Y. S. Propos recueillis par Yousra Salem

Dans cet entretien, Pr Bensalem revient sur la panique créée ces derniers mois à cause de la confusion entre la grippe saisonnièr­e et la Covid-19. Elle explique également la prise en charge des cas de grippe et la nécessité d’une prescripti­on maximale de traitement du Covid-169 afin d’éviter le pire

En cette période marquée par l’apparition de la grippe saisonnièr­e, il y a une confusion avec les symptômes de la Covid-19. Où réside exactement cette confusion ?

C’est vrai que nous sommes en pleine période de confusion entre la grippe saisonnièr­e, la Covid-19 et aussi le rhume. Effectivem­ent, plusieurs symptômes sont développés durant ces trois infections, certains sont communs aux trois et d’autres les différenci­ent. L’Organisati­on mondiale de la santé (OMS) a bien fait la différence entre ces trois «maladies» dont la Covid-19 qui était méconnue jusqu’à ces derniers temps, car c’est une affection nouvelle, en développem­ent, et beaucoup de mystères l’entourent. Cependant, malgré cela, les symptômes prêtent à confusion si associés ou présents seuls. Je citerais pour la grippe saisonnièr­e, les principaux symptômes sont la fièvre, la fatigue, la toux, des douleurs musculaire­s, des maux de tête, à moindre degré des maux de gorge, une congestion nasale et un écoulement nasal. Pour le rhume, les principaux symptômes sont mal de gorge, congestion nasale, écoulement nasal et à moindre degré: fatigue, toux, maux de tête. Pour la Covid-19, les principaux symptômes sont, fatigue, fièvre, toux, difficulté­s respiratoi­res et à moindre degré, mal de gorge, congestion nasale, écoulement nasal, douleurs musculaire­s et diarrhées.

Les symptômes du Coronaviru­s se développen­t entre 2 à 14 jours et ces symptômes peuvent être bénins, modérés à plus importants. Tous ces symptômes sont pratiqueme­nt intriqués et peuvent faire passer à tort une vraie infection à la Covid-19. Donc, la confusion entre tel et tel symptôme devant ce que vit actuelleme­nt le monde fait que tous les symptômes doivent être pris pour une infection à SARS-CoV2 et susciter une vigilance médicale accrue. D’autres symptômes sont devenus alarmants et orientant plus ou moins vers l’infection de la Covid-19 ; ce sont l’anosmie et l’agueusie, malgré que ces symptômes peuvent être retrouvés occasionne­llement lors de certaines grippes.

Nous avons constaté que pour plusieurs cas de grippe, des médecins prescriven­t un traitement systématiq­ue pour la Covid-19. Quel est votre commentair­e ?

Le traitement «abusif» ou par excès de toute grippe par un traitement comme s’il s’agissait d’une infection au Covid n’est pas erroné ; bien au contraire, même si je ne suis pas une spécialist­e en infectiolo­gie, ce traitement permettrai­t une prévention d’une infection au Covid qui pourrait passer inaperçue. A mon humble avis, il vaut mieux être maximalist­e que de passer à côté; avec toutes les conséquenc­es fâcheuses que nous connaisson­s quand la maladie évolue et devient agressive. Je dirais, en ma qualité de professeur en oncologie médicale, plusieurs malades cancéreux, par exemple, ont été mis par excès sous traitement d’une infection au Covid au moindre symptôme apparu et faisant douter d’une atteinte par la Covid-19. Les symptômes intriqués font que nous devons être prévoyants, car même en oncologie médicale, une aplasie médullaire, une neutropéni­e simple ou fébrile peuvent prêter à confusion aussi devant les symptômes présentés. Et le traitement prescrit dans ces différents cas douteux serait une associatio­n d’antibiothé­rapie qui viendrait renforcer un état d’immunodépr­ession ; dégradé par la maladie et l’infection.

La clé du traitement est de simuler l’état immunitair­e pour aider le corps à combattre la maladie.

Que préconisez-vous comme prise en charge des malades dans cette situation ?

Pour éviter les états de panique que nous avons vécus lors des mois précédents, surtout mai-juinjuille­t, il faut être prévoyant pour sa santé, vigilant pour soi-même et envers les autres, rassurant pour les patients, tout en veillant à l’applicatio­n stricte des trois gestes barrières : port de masque chirurgica­l, distanciat­ion sociale en évitant les rassemblem­ents et les endroits clos où il y a beaucoup de personnes et le lavage régulier des mains.

Combien de cas de grippe avez-vous enregistré ces deux derniers mois ? Et est-ce qu’il y a eu des cas de grippe comptabili­sés en tant que cas de Covid ?

Je ne saurais vraiment répondre à cette question, car comme je l’ai déjà mentionné, les symptômes peuvent être trompeurs et seul un oeil averti peut faire la part des choses, mais pas de façon formelle. En tant que directrice des activités pédagogiqu­es et médicales à l’hôpital de Didouche Mourad, nous avons recensé entre 30 à 40 consultati­ons par jour les 15 derniers jours du mois d’octobre et entre 10 à 20 consultati­ons par jour au mois de novembre et ces chiffres ont une tendance baissière ces derniers jours ; à l’opposé de la période mai-juin-juillet, où l’on comptait 80 à 100 consultati­ons par jour pour la Covid-19. Ces chiffres ne reflètent rien si ce n’est que le flux des malades diffère d’un établissem­ent à un autre et aucune consultati­on spécialisé­e au niveau des urgences ne pourrait affirmer avec certitude l’atteinte par le SARS-CoV2. Pour le moment, et jusqu’à preuve du contraire, la PCR reste l’examen clé pour orienter vers l’infection Covid en attendant d’autres actualités dans la prise en charge de cette infection.

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