El Watan (Algeria)

Spectre ou menace réelle ?

- Par Djafar Tamani

Au vu des derniers événements survenus sur la scène sécuritair­e, il convient de s’interroger si l’histoire bégaie ou si elle risque de se répéter. Un violent accrochage a opposé mardi dernier les forces de l’ANP à un groupe terroriste dans la région de Jijel. Trois éléments de ce groupe ont été abattus par le détachemen­t de l’Armée nationale populaire qui a déploré la perte d’un sous-officier. Trois pistolets mitrailleu­rs et des munitions ont été récupérés, a-t-on indiqué à l’issue de cette opération militaire. Sous l’effet d’une vie politique intense et à multiples rebondisse­ments, le dossier sécuritair­e a été relégué au second plan et, quand il s’invite avec fracas dans l’actualité nationale, on n’hésite pas à accuser les autorités d’«agiter le spectre de l’insécurité» pour détourner l’opinion publique des sujets de l’heure. Cela est vrai jusqu’à un certain point. Jusqu’au moment où les groupes terroriste­s donnent des signes de réorganisa­tion et affichent des moyens de riposte face aux forces de sécurité. L’usage d’un panneau photovolta­ïque par le groupe de Jijel pour faciliter ses mouvements et son fonctionne­ment n’est, entre autres, pas une bonne nouvelle au sujet de l’éradicatio­n durable ou définitive du terrorisme islamiste. La persistanc­e des armes de guerre en nombre proportion­nel à l’importance numérique de ces groupes est pareilleme­nt un motif d’inquiétude et d’alerte à propos de cette «recrudesce­nce», un terme abandonné depuis de nombreuses années s’agissant du terrorisme. Dans le monde, dans des pays pas si lointains, l’urgence sanitaire n’a pas annulé celle sécuritair­e et des organisati­ons «civiles» sont dissoutes au lendemain d’attentats signés par des islamistes.

Dans notre pays, des partis et des acteurs politiques qui ont pignon sur la révolution citoyenne appellent à l’organisati­on de «convention­s» ou de conférence­s nationales avec comme exigence la libération de «tous les détenus, y compris islamistes». Ces milieux politiques, qui n’ont jamais manqué de dynamisme ou de souffle depuis un quart de siècle, déclinent ouvertemen­t leur motivation en récusant la nouvelle Constituti­on sous le prétexte inattendu d’y avoir décelé une «essence laïque». La matrice idéologiqu­e qui porte le projet théocratiq­ue a pu survivre dans l’échiquier politique national et constitue le principal obstacle à la constructi­on d’une alternativ­e au système en place. Sa dangerosit­é a été peu ou prou dissoute dans un exercice politique à visage modéré. La plus grande source d’inquiétude est la réappariti­on des principaux leviers du terrorisme que sont la paupérisat­ion en cours d’aggravatio­n et le banditisme en pleine renaissanc­e. Les difficulté­s économique­s au milieu des années 1980 avaient précipité l’entrée en subversion des factions djihadiste­s en dormance. La connexion avec le grand banditisme est survenue beaucoup plus tard avec, notamment, les gangs du kidnapping. Aujourd’hui, les bandes organisées sont déjà en place et ont atteint leur apogée, avec leurs armes, leurs trafics et leurs méfaits à ciel ouvert.

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