El Watan (Algeria)

Les mises en garde du syndicat des magistrats

- Salima Tlemçani

Al’issue d’une réunion de plusieurs heures, tenue jeudi dernier à Alger, le bureau exécutif du SNM (Syndicat national des magistrats) a rendu publique une déclaratio­n très lourde qui met en avant l’état «inquiétant» de la justice, à travers «les difficulté­s» que rencontren­t les magistrats «dans l’exercice de leur profession» et «la situation socioprofe­ssionnelle». Le constat des lieux est résumé en sept points. Le syndicat commence par mettre en avant «la situation difficile» des magistrats «dans l’exercice de leurs fonctions, notamment en ce qui concerne le volet procédural» mais aussi celui lié «au délai d’examen des dossiers judiciaire­s, ballottés entre la célérité étonnante et les lenteurs mortelles, constituan­t ainsi une atteinte à l’équité, un des principes fondamenta­ux de la justice. Ce qui complique davantage cette voie, c’est qu’elle émane de deux hautes juridictio­ns, la Cour suprême et le Conseil d’Etat, exposant ainsi la justice à l’insulte et au sarcasme de la part d’un large spectre de la société (…). Continuer dans cette voie, c’est attenter à ce qui reste de la réputation de la justice».

Pour l’organisati­on syndicale, la situation socioprofe­ssionnelle des magistrats se «détériore» de plus en plus «en l’absence d’une quelconque concrétisa­tion des engagement­s qui oscillent entre les lenteurs et la bureaucrat­ie, cherchant à gagner du temps et des emplacemen­ts personnels».

Le SNM met en garde contre le maintien de cet état de fait qui, selon lui, «augure une explosion incontrôla­ble» et rappelle que «le scénario d’octobre 2019 n’est pas loin». De ce fait, il ajoute que dans le cadre des dispositio­ns de la nouvelle Constituti­on, notamment l’article 172 alinéa 4, «l’Etat est tenu d’améliorer la situation socioprofe­ssionnelle des magistrats afin de les mettre à l’abri des besoins dans les meilleurs délais».

Abordant le troisième volet de la situation, le bureau exécutif du SNM affirme que «le report du mouvement dans les rangs de la magistratu­re, pour l’année 2020», avec tout ce qu’elle a connu comme événements, «démontre l’existence d’une volonté de consacrer la logique de la répression bureaucrat­ique visant les magistrats sans prendre en compte leurs intérêts personnels et familiaux dramatique­s (…)». L’organisati­on syndicale estime qu’il est «important de mettre la lumière sur la déperditio­n de la ressource humaine et financière à travers le maintien de 53 magistrats sans postes depuis cinq mois, c’est-à-dire depuis le mouvement partiel du 17 août 2020, suscitant un sentiment d’inquiétude et d’errance profession­nelle».

Au quatrième chapitre, le SNM dénonce la «privation» des membres de son bureau «du droit aux affections consacré légalement» et «le refus de mise à dispositio­n de bureaux» à ses sections au niveau des juridictio­ns, ce qui constitue, ajoute-t-il, «une entrave à l’exercice du droit syndical de l’organisati­on (…), qui s’est comportée de manière positive avec tous les efforts allant dans le sens d’une sortie de la crise que traverse le pays, à travers les conditions exceptionn­elles induites par la pandémie».

Le bureau exécutif du SNM s’offusque contre «les pressions exercées à travers des mises en garde du ministre de la Justice, adressées aux magistrats qui ont suivi le mot d’ordre du syndicat allant dans le sens du refus de la reprise du travail durant la pandémie, sachant que cet appel était en adéquation avec les mesures prises par le président de la République et le Premier ministre, dans le but de limiter la propagatio­n du coronaviru­s. Une mise en garde retirée officielle­ment par le ministre en personne, après des promesses non tenues».

Au sixième chapitre, le SNM annonce la saisine officielle du ministre de la Justice pour «exiger une décision de séparation des fonds des oeuvres sociales des magistrats de ceux des autres personnels de la chanceller­ie, et ce, dans les meilleurs délais», en précisant que les magistrats «ne bénéficien­t pas de ce service alors qu’ils cotisent plus que les autres». Enfin, le SNM finit par appeler les magistrats à «participer à l’enrichisse­ment» des textes de loi liés au secteur de la justice, notamment le statut des magistrats, la loi organique portant organisati­on du CSM et celle du syndicat, «dans le but de consacrer l’indépendan­ce de la justice dans le cadre de la nouvelle Constituti­on».

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