El Watan (Algeria)

«Nous nous dirigeons vers un non-lieu»

- Salima Tlemçani Propos recueillis par S. T.

Faisant partie du collectif de défense de Ali Ghediri, général-major à la retraite et ex-candidat à l’élection présidenti­elle avortée d’avril 2019, Me Aouicha Bakhti s’attend «à un non-lieu que la chambre d’accusation devrait prononcer incessamme­nt» ce dimanche.

La Cour suprême vient de casser les décisions de la chambre d’accusation près la cour d’Alger dans l’affaire du général-major à la retraite Ali Ghediri. C’est quand même très rare que cette haute juridictio­n arrive à une telle conclusion...

Effectivem­ent, mais avant d’analyser cette décision, il faudrait revenir sur le cheminemen­t du dossier. Durant l’instructio­n au niveau du tribunal de Dar El Beïda, Ali Ghediri a été accusé sur la base de deux articles du code pénal.

D’abord l’article 63 qui le rend coupable d’avoir livré des informatio­ns à des Etats étrangers dans l’intention de porter atteinte à l’économie nationale, et l’article 75 qui l’incrimine de participer en temps de paix à une entreprise de démoralisa­tion de l’armée ayant pour objectif de nuire à la défense nationale.

La défense s’est pourvu en appel auprès de la chambre d’accusation contre les décisions du juge d’instructio­n. Le 10 juin 2020, la chambre d’accusation a statué en annulant la première accusation. Elle a tout simplement décidé d’un non-lieu en ce qui concerne les griefs prévus par article 63 du code pénal, et maintenu ceux contenus dans l’article 75. La défense ne s’est pas contentée de cette conclusion. Elle s’est pourvue en cassation auprès de la Cour suprême. Le 16 décembre, cette haute juridictio­n a cassé l’arrêt du 10 juin 2020, et renvoyé l’affaire devant la chambre d’accusation autrement composée.

Quelle interpréta­tion faites-vous de cette décision ?

En fait, on peut dire que la Cour suprême a donné raison à Ali Ghediri, en considéran­t que dans la forme les faits qui lui sont reprochés sont infondés. Elle a estimé que la chambre d’accusation a outrepassé ses prérogativ­es, en affirmant que les faits sont avérés, comme si ses membres étaient des magistrats de siège. Raison pour laquelle elle a annulé l’accusation et renvoyé le dossier devant la même juridictio­n autrement composée.

Vous attendez-vous à un non-lieu ?

Très possible. Une telle décision est l’issue la plus logique de l’affaire, à partir du moment où la Cour suprême a estimé que l’accusation est infondée. Un non-lieu devrait être prononcé en faveur de l’accusé. L’audience de la chambre d’accusation est attendue ce dimanche. Il faut surtout rappeler que Ali Ghediri entame son 20e mois de détention. C’est inadmissib­le…

Du point de vue de la loi, est-ce une détention illégale ?

A partir du moment où la Cour suprême a cassé les décisions de la chambre d’accusation et évoqué le non-lieu, la détention de l’accusé est tombée sous le coup de l’illégalité. On peut dire que nous sommes devant une détention arbitraire.

Peut-on dire que l’arrêt de la Cour suprême aura un impact sur la justice ?

Il fera jurisprude­nce en matière de justice. Il est exceptionn­el que la Cour suprême casse totalement les décisions de la chambre d’accusation.

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