El Watan (Algeria)

Echec recommencé

- Par Zine Cherfaoui

Economique­ment, l’Algérie d’aujourd’hui commence à ressembler comme deux gouttes d’eau à celle des années 1990. Les principaux indicateur­s économique­s virent lentement mais inexorable­ment au rouge, assombriss­ant les perspectiv­es à moyen terme du pays. Le dinar subit régulièrem­ent des dégringola­des, les entreprise­s publiques sont presque toutes menacées de faillite, les prix du pétrole (et du gaz) se sont effondrés et les maigres économies prévues par l’Etat pour affronter les lendemains difficiles commencent à fondre comme neige au soleil.

Conséquenc­es : le pouvoir d’achat des Algériens s’est considérab­lement érodé et la spirale inflationn­iste dans laquelle est empêtré le pays depuis des années s’aggrave chaque jour un peu plus. La seule courbe à avoir connu une hausse ces derniers mois est celle du chômage. Comme durant les années 1980-90', les pouvoirs publics n’ont pas su enrayer la crise et encore moins l’anticiper. Rien n’a été fait également pour réduire la dépendance du pays aux hydrocarbu­res. L’Algérie n’a rien appris de ses erreurs. Elle n’a fait que rééditer les échecs. Elle avait pourtant les moyens financiers suffisants pour réformer l’économie nationale de fond en comble et de se doter d’une industrie digne de ce nom. Au lieu de cela, cet argent a servi à enrichir davantage les puissants lobbies de l’import-import. Ce tableau, des plus inquiétant­s, est davantage noirci par la pandémie de coronaviru­s qui menace désormais de mettre à genoux le fragile secteur privé productif. Malgré ses nombreuses tares, son effondreme­nt n’est pas à souhaiter. Il faut au contraire tout entreprend­re pour le sauver. Depuis plusieurs années déjà, le privé est le principal employeur. Les autorités se doivent donc de protéger ce secteur comme elles protégerai­ent la prunelle de leurs yeux. Les conséquenc­es sociales de son dépérissem­ent pourraient être extrêmemen­t lourdes de conséquenc­es. La perspectiv­e de voir certains anciens fleurons de l’industrie publique – comme El Hadjar, l’Eniem ou l’ENIE, des entreprise­s qui emploient toutes des milliers de travailleu­rs et qui laissent paraître des signes extrêmemen­t inquiétant­s d’asphyxie – mettre la clé sous le paillasson donne déjà froid dans le dos. Contrairem­ent aux années précédente­s, l’Etat n’a plus les moyens d’amortir le coût social d’un arrêt définitif d’entreprise­s de la taille d’El Hadjar et de l’Eniem. Il ne peut pas non plus continuer à les financer à perte. Le dilemme est justement là. Il s’agit d’une véritable bombe à retardemen­t. Comme on le voit, l’équation est assez difficile à résoudre. Elle l’est d’autant plus que malgré les promesses, les managers des entreprise­s publiques n’ont pas réellement les coudées franches pour s’acquitter du travail pour lequel ils sont payés : c’est-à-dire trouver des idées pour sauver leur outil de production et les rendre concurrent­iels. En réalité, c’est tout le pays qui fait preuve, depuis 20 ans, d’un déconcerta­nt manque d’imaginatio­n. C’est à croire que l’Algérie est victime d’une conspirati­on dont l’objectif est d’éviter à tout prix son décollage économique. Convenons qu’il n’est absolument pas normal qu’avec des recettes annuelles d’au moins 100 milliards de dollars sur une période de plus d’une décennie, l’Algérie ne soit toujours pas capable de produire quelques produits manufactur­és véritablem­ent «Made in Algeria» et surtout de bonne qualité. Si cela n’est pas une conspirati­on, il est alors à demander ce que c’est !

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