El Watan (Algeria)

Flambée des prix en l’absence de contrôle

- Kamel Benelkadi

Une flambée spectacula­ire des prix de la viande rouge a été constatée au niveau de plusieurs boucheries de la capitale. La viande est devenue carrément un produit de luxe en Algérie, que ne peuvent acheter que les riches. Avec la forte chute du pouvoir d’achat des Algériens, des pans entiers de la population seront privés de cet aliment dans un contexte de crise économique, d’explosion du chômage et de multiples privations. Ce qui n’augure rien de bon à quelques semaines du Ramadhan. L’Etat doit réagir rapidement.

Contacté, Merouane Khiar, président de la Commission nationale des distribute­urs de viande rouge, activant sous la houlette de l’ANCA, nous explique les raisons de cette situation. En premier lieu, il cite «la cherté des aliments de bétail, qui ont doublé presque 2 fois au marché de gros, et le gel de l’importatio­n des viandes fraîches ou congelées, décidé par les pouvoirs publics depuis le dernier trimestre 2020 pour protéger la production nationale».

Pour les autorités, le gel permet de préserver annuelleme­nt 200 millions de dollars. Cette décision, selon notre source, «a fermé la porte de la concurrenc­e et a été fatale pour les consommate­urs». Pour le mois de Ramadhan, si le gouverneme­nt ne prend pas les décisions nécessaire­s, ce sera la saignée et peut-être l’étincelle à un mouvement de mécontente­ment général, qui risque de dégénérer en contestati­on. «Même celui qui a de l’argent ne mangera pas de viande», ironise-t-il. Il faut dans ce cadre aider les éleveurs et ouvrir l’importatio­n, mais à une cinquantai­ne d’opérateurs pas à deux ou trois qui vont imposer leur monopole. «Il faut aussi durcir et multiplier les opérations de contrôle autour des abattoirs clandestin­s, qui sacrifient des agneaux, ce qui constitue une atteinte grave et une destructio­n du cheptel.» Autre facteur à prendre en compte : certains commerçant­s donnent libre cours à leur insatiable appétit et ne semblent privilégie­r que l’enrichisse­ment, obsédés par l’envie de faire des bénéfices même en cette période de dégradatio­n du pouvoir d’achat. Sur le marché de gros, le veau est cédé en moyenne à 1120 DA/le kilo et entre 1250 et 1350/le kilo pour l’agneau. Merouane Khiar lance un appel urgent aux pouvoirs publics pour intervenir. La filière viande rouge est pointée du doigt, les problèmes en amont et en aval font en sorte de pérenniser un système de gestion dépassé, dont les retombées sur les consommate­urs ne sont que le reflet d’une instabilit­é du marché et une crise réelle d’une offre qui reste faible, vu que la demande est croissante et les prix stagnent à des niveaux élevés depuis des années, ce qui constitue un handicap certain pour une grande partie des consommate­urs dont le pouvoir d’achat s’est dégradé avec l’inflation et la dévaluatio­n du dinar. La consommati­on moyenne de viande rouge par habitant est de 14,4 kg par an. Un niveau relativeme­nt faible comparativ­ement aux pays industrial­isés. Ce dossier doit être pris en charge en urgence par le gouverneme­nt et notamment par le ministère du Commerce. Kamel Rezig, ministre du Commerce, avait tenté l’année dernière d’aller en guerre contre le lobby de la viande, mais il n’a pas pu en venir à bout.

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