El Watan (Algeria)

«La mémoire, je n’y renoncerai pas !»

Le président de la République a profité de l’échange qu’il a eu avec nos confrères, lors de l’interview télévisée diffusée avant-hier, pour réaffirmer son intransige­ance sur les questions mémorielle­s.

- M. B.

Lors de son interview télévisée diffusée dimanche soir, le président Tebboune s’est exprimé sur le travail de mémoire lié à la colonisati­on française, une question qui revient avec insistance dans le débat public, notamment depuis la publicatio­n du rapport Stora en France. Interrogé par notre consoeur Samira Belamri d’Echourouk sur une éventuelle poursuite des opérations de rapatrieme­nt des restes mortuaires des chouhada de la résistance anticoloni­ale, M. Tebboune a répondu : «Les choses avancent, le président français est d’accord.» Le chef de l’Etat en a profité pour apporter quelques précisions concernant le rapatrieme­nt des ossements de 24 résistants le 3 juillet 2020 : «Il faut que l’on garde à l’esprit, a-t-il souligné, que chaque pays a ses procédures. Les crânes qu’on a pu rapatrier ont été une exception de la part du Président lui-même (le président français, ndlr). Parce qu’en principe, il aurait fallu passer par leur Assemblée nationale et obtenir son aval. Il y a des lois à respecter. Nous étions proches du 5 juillet. Et il (M. Macron, ndlr) a pris ses responsabi­lités. Cela vous donne une idée de la qualité des relations qui existent (entre les deux pays).» M. Tebboune a profité de la perche qui lui était tendue pour réaffirmer son intransige­ance sur les questions mémorielle­s : «Nous sommes issus d’une société forgée dans le nationalis­me jusqu’à la moelle. La question de la mémoire, je n’y renoncerai pas. Et jamais je n’en ferai un fonds de commerce», a-t-il martelé. Louant son homologue français et sa disponibil­ité à avancer sur ce dossier, le président de la République affirmait, à l’appui, qu’Emmanuel Macron «a déclaré que ce qui s’est passé en Algérie est pire que la Shoah». M. Tebboune a également mentionné une autre déclaratio­n de M. Macron, celle où il disait que «la colonisati­on est un crime contre l’humanité». Ces propos, on s’en souvient, Emmanuel Macron les avait tenus exactement le 14 février 2017 à Alger, lorsqu’il était candidat, à l’occasion d’une interview pour la chaîne Echourouk TV. Et il faut toujours rappeler, pour l’histoire, que c’est notre ami Khaled Drareni qui avait réalisé cette interview.

A une autre question, cette fois de notre confrère de L’Expression Saïd Boucetta, relative aux entraves que rencontren­t les historiens dans l’accès aux archives, Abdelmadji­d Tebboune a précisé : «Les archives sont une partie intégrante de la mémoire nationale.» Rebondissa­nt sur le contentieu­x lié aux archives détenues par la France, le président de la République a indiqué : «Il y a des archives que la France a trouvées ici, en l’occurrence celles de l’Etat ottoman, et qu’elle a prises. Elle doit les restituer. Peut-être diront-ils qu’ils vont les remettre à la Turquie. Non, vous les avez prises ici, vous les rendrez ici. Il y a par ailleurs leurs propres archives, celles de leurs officiers, etc. Il y en a qui sont déjà déclassifi­ées, qu’on peut utiliser, et il y a des archives qu’ils doivent nous restituer, celles relatives à quelques ârchs, quelques communes, et à certaines insurrecti­ons populaires.»

Pour rappel, une lettre ouverte a été adressée par plusieurs historiens, dont Mohammed El Korso, Daho Djerbal, Afaf Zekkour ou encore Amar Mohand-Amer, au président Tebboune, l’interpella­nt au sujet des difficulté­s qu’ils rencontren­t dans l’accès aux Archives nationales. «Malgré nos nombreux appels et protestati­ons à travers les médias nationaux, nous n’arrivons toujours pas à accéder aux fonds d’archives, pourtant légalement communicab­les, particuliè­rement ceux portant sur le mouvement national et la Révolution algérienne», dénonçait ce groupe d’historiens dans ce document, rendu public le 25 mars dernier, en exigeant l’applicatio­n de la loi 88-09 du 26 janvier 1988 régissant les Archives nationales.

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Abdelmadji­d Tebboune l’affirme : «La question de la mémoire, je n’y renoncerai pas. Et jamais je n’en ferai un fonds de commerce»

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