El Watan (Algeria)

Les mises en garde des défenseurs des droits de l’homme

- Nabila Amir

Le sort des 23 détenus d’opinion en grève de la faim depuis le 6 avril dernier inquiète fortement les organisati­ons algérienne­s de défense des droits de l’homme. La Ligue dirigée par Noureddine Benissad est sortie ce jeudi de sa réserve pour mettre en garde les autorités contre la réédition des tristes scénarios du militant Kamel Eddine Fekhar et du journalist­e Mohamed Talmalt, morts en prison en 2016 et en 2019, suite à une grève de la faim.

Ces jeunes militants du hirak en sont à leur neuvième jour de grève de la faim et semblent déterminés, selon leurs avocats, à poursuivre leur action, entamée deux jours après leur interpella­tion lors d’une manifestat­ion pacifique. A travers leur action, ils dénoncent et protestent contre les arrestatio­ns, les détentions arbitraire­s et les conditions carcérales inhumaines. Tout en rappelant les circonstan­ces de l’arrestatio­n de ces grévistes et les griefs retenus contre eux, la LADDH demande leur libération en urgence et tiendrait pour responsabl­es «les autorités politiques et judiciaire­s quant à toute évolution dramatique de la situation». Pour la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADDH), la liberté de manifester pacifiquem­ent est consacrée par la Constituti­on algérienne et le Pacte des droits civils et politiques ratifié par l’Etat algérien. «La criminalis­ation du droit à manifester est une atteinte flagrante du droit et à la morale. L’Etat est pleinement responsabl­e de la santé des personnes détenues et a l’obligation de veiller à ce qu’elle soit préservée», met en garde la LADDH, qui demande la libération de tous les détenus arrêtés dans le cadre du hirak. Les 23 jeunes manifestan­ts incarcérés à la maison d’arrêt d’El Harrach sont poursuivis pour «incitation à attroupeme­nt non armé», «attroupeme­nt non armé», «atteinte à l’unité nationale» et «outrage à corps constitué». La LADDH dénonce ces accusation­s. «Les détenus du hirak contestent sur la forme et sur le fond les accusation­s portées contre eux», note la Ligue, précisant que ces grévistes de la faim considèren­t, à juste titre, qu’ils sont victimes de l’arbitraire alors qu’ils n’ont fait qu’exercer leur droit de s’exprimer et de manifester. Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, a alerté, dans une lettre ouverte à l’opinion nationale et internatio­nale, sur le danger de mort qu’encourent les grévistes de la faim. «Nous exigeons leur libération immédiate et inconditio­nnelle. Une fois de plus, les représenta­nts de l’Etat et des pouvoirs publics montrent leur désengagem­ent et leur mépris envers la vie et la dignité humaine et nous nous donnerons les moyens d’action que la loi nous confère», déplore-t-il. Certains grévistes, selon le collectif d’avocats, commencent à avoir de graves complicati­ons et plusieurs d’entre eux ont été évacués mercredi dans la soirée à l’hôpital. L’avocat Mokrane Aït Larbi, un autre défenseur des droits de l’homme, appelle à la libération des détenus d’opinion. 23 jeunes ont été arrêtés depuis le 3 avril et huit d’entre eux ont été évacués à l’hôpital à la suite d’une grève de la faim. «Quand le pouvoir politique cessera-t-il l’arrestatio­n des Algériens pour leurs opinions ?» s’est-il interrogé, avant de rappeler que «l’Algérie s’apprête à célébrer le 60e anniversai­re de son indépendan­ce et continue à emprisonne­r les Algériens pour leurs opinions». «Je demande la libération de tous les détenus d’opinion et appelle la justice à accomplir son rôle, qui est de protéger les libertés et les droits de l’homme et de laisser la prison aux grands criminels», écrit-il dans un texte mis en ligne sur les réseaux sociaux.

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