Les «origines du monde» ou l’art au service de la science au XIX siècle
Dans la nef du Musée d’Orsay, à Paris, la présence de l’éléphante Marguerite intrigue : l’exposition «Les origines du monde» invite à découvrir combien les sciences, animalière, botanique ou biologique, ont inspiré les artistes au XIXe siècle. Avec plus de cinq mois de retard, cette exposition exceptionnelle, fruit de trois ans de travail, ouvre enfin au public mercredi.
Elle a pu être prolongée jusqu’au 18 juillet après d’intenses négociations avec les prêteurs. L’exposition a été réalisée avec la collaboration des équipes scientifiques du Muséum d’histoire naturelle. Elle prend la suite d’autres expositions thématiques comme «Le Modèle noir» l’an dernier, qui avait exploré une autre évolution majeure des représentations dans l’art au XIXe. Comme pour
«Le Modèle noir», la période retenue est «le long XIXe siècle», jusqu’à la rupture de la guerre de
14-18. Au milieu de cette période, paraît «L’origine des espèces» (1859) de Charles Darwin. Ce penseur pivot de l’évolutionnisme va dominer au détriment d’autres injustement oubliés. Quatrevingts prêts ont enrichi l’exposition, au sous-titre évocateur : «L’invention de la nature au XIXe siècle». Des cartels surmontés d’une silhouette d’éléphant ont été spécialement accrochés à hauteur d’enfant. L’exposition restitue les multiples interactions entre sciences et arts au moment où les savants imposent leur vision du monde, alors que l’ordre ancien des connaissances fondé sur le religieux se fracture. La conception de la place de l’homme dans le monde se modifie à mesure des découvertes qui s’enchaînent, suscitant débats, remises en cause et interprétations. Cela mobilise les peintres dans une diversité d’inspirations très bien rendue. L’exposition montre la priorité d’alors : faire l’inventaire de la nature. Tout est remis en cause. L’origine de la vie remonte à des millions et non quelques milliers d’années. L’homme descend du singe. Le nombre d’espèces connues explose. Les savants et explorateurs découvrent l’infiniment petit, les fonds marins, la géologie, les planètes, les animaux disparus, fossiles et autres dinosaures. Tout cela relativise la vision judéo-chrétienne du jardin d’Eden, où l’homme est au centre de la création.