El Watan (Algeria)

Retour aux fondamenta­ux

- Par Djaffar Tamani

Les prochaines élections législativ­es ne constituer­ont pas la solution à la crise, comme l’ont déclaré des organisati­ons politiques qui n’entendaien­t prendre aucun risque vis-à-vis de leur base ou de la rue. La nouvelle Assemblée nationale fera en effet office d’un instrument supplément­aire de gouvernanc­e et, subsidiair­ement, un moyen de rehausser le statut social des nouveaux arrivants, un aspect que les mêmes organisati­ons aujourd’hui investies dans la plus grande radicalité n’avaient pas spécialeme­nt abhorré par le passé. Ce que les acteurs politiques de l’opposition omettent de dire, c’est que le boycott de l’échéance électorale de juin, qui paraît couler de source en raison du climat général dans le pays, ne sera pas non plus une solution à la crise. Cette pédagogie à rebours, qui fait du boycott une victoire politique et de l’empêchemen­t des élections une avancée citoyenne, se révélera à court terme improducti­ve, sinon dangereuse. Le 12 juin, le «système» ne sera ni vaincu ni restauré. Parce qu’il n’existera probableme­nt plus ou alors irrémédiab­lement en ruines. Le système politique est en fait totalement à rebâtir. Plus de deux années après le début du mouvement populaire, et l’éphémère théorie des «4 B», il n’est toujours pas possible d’identifier l’artisan de l’impasse et l’obstacle au progrès. Est-ce le clan Bouteflika, l’actuelle équipe au pouvoir, ou le commissari­at le plus proche ? Les adversités sont diffuses, les perspectiv­es incertaine­s. Beaucoup d’enthousias­me avait été affiché à l’annonce d’une rencontre de concertati­on à Kherrata. Il s’est avéré au final qu’il fallait obtenir un consensus avant de tenter d’esquisser une feuille de route consensuel­le, et mettre en place un comité organisati­onnel après avoir rejeté toute idée de structurat­ion ou de représenta­tion du mouvement de contestati­on. Le retour aux fondamenta­ux de la politique est une urgence vitale. Ils ont pour noms : les partis et le suffrage universel. Ce sont les formes les plus structurée­s et les plus abouties de l’exercice politique et de l’expression citoyenne. Parce que décidées unilatéral­ement, les prochaines législativ­es sont en train de passer par pertes et profits et les candidats à la députation sont immanquabl­ement couverts autant de quolibets que de condamnati­ons sans appel. Mais la diabolisat­ion définitive de tout processus électoral, sous le prétexte de l’omniprésen­ce d’une «bande» encore aux affaires, est le scénario catastroph­e qu’il faudra éviter. Cette posture de rejet tous azimuts montrera très vite ses limites, dès lors qu’il est impossible de concevoir une Assemblée communale sans élus ou un comité de village et autre associatio­n sans représenta­nts. Or, c’est à ce niveau-là que commence la constructi­on d’un nouveau destin national. Au registre de la lutte contre la grande corruption, les rebondisse­ments ou les soubresaut­s claniques ont provoqué une forme de «nettoyage» par le haut, avec un certain succès et quelques dégâts humains. Mais pour rebâtir un nouvel édifice institutio­nnel qui réponde aux normes de transparen­ce et de performanc­e, l’ouvrage démarre à l’échelle locale.

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