Imminents dépôts de la Libye et du Qatar pour le sauvetage
l Le Fonds monétaire international exige l’engagement des partenaires sociaux sur le plan de restructuration l Le temps presse l Ne reste que l’alternative de dépôts à la Banque centrale, avec des espoirs du côté de Tripoli et Doha.
Le chef du gouvernement tunisien, Hichem Mechichi, multiplie ses visites à l’étranger ; Lisbonne, le Portugal assurant la présidence de l’UE, Tripoli et Doha, avec l’espoir d’obtenir des dépôts de fonds qataris et libyens à la Banque centrale.
La Tunisie multiplie les démarches pour obtenir de l’aide internationale et réussir à freiner la crise économique et financière qui la secoue, en attendant une solution avec le Fonds monétaire international (FMI) et les institutions financières internationales.
BLOCAGE
L’ambassadeur américain en Tunisie, Donald Blome, a déclaré à nos collègues de Leaders, au début de mois de mai, qu’il «appartient à la Tunisie de relever ses défis économiques, de changer de modèle et d’engager les réformes nécessaires», en faisant remarquer que «l’entente entre le gouvernement, l’UGTT et l’Utica, auxquels il conviendrait d’associer la société civile, enverra un signal fort de crédibilité à l’adresse des Etats-Unis et des bailleurs de fonds». Et de signaler que «le temps se fait plus court et plus pressant». M. Blome n’a fait que répéter ce qu’avait dit avantlui, en mars dernier, Farid Belhaj, le Tunisien, vice-président de la Banque mondiale en charge de la zone MENA. M. Belhaj a passé une dizaine de jours en Tunisie et a rencontré tous les acteurs. Sa conclusion est claire quant à la nécessité de réunir tous les intervenants sur le plan de la réforme. Or, les amis de la Tunisie et les institutions financières internationales constatent que les Tunisiens sont «à couteaux tirés», notamment le président de la République, Kaïs Saïed, et celui de l’Assemblée des représentants du peuple, Rached Ghannouchi. Partant de cette situation intérieure chaotique, à laquelle s’ajoute une grève de quatre semaines des recettes fiscales, du 26 avril au 24 mai, en plus du quasi-blocage de la production de phosphate, depuis des années déjà, la crise s’est plutôt aiguisée, au lieu d’entrevoir des perspectives. La crise sanitaire n’a fait que compliquer davantage une situation difficile. «Les responsables politiques ne cherchent pas l’intérêt de la Tunisie, mais plutôt leurs propres intérêts», assure Noureddine Taboubi, secrétaire général de la puissante centrale syndicale UGTT, qui a proposé, depuis novembre 2020, un dialogue national entre tous les acteurs de la scène politique et sociale. «Il n’y a jamais eu d’accord sur les priorités entre les acteurs politiques», se reprochee Taboubi qui craint fort pour la Tunisie. Le secrétaire général de l’UGTT n’est pas parvenu à convaincre le président Saïed de s’asseoir avec les principales composantes politiques et sociales pour trouver une solution à travers ce dialogue national. Le président Saïed refuse d’associer les corrompus et les populistes.
DIVERGENCES
Le FMI refuse d’avancer avec la Tunisie pour éviter un programme de réformes non réalisables. «Les institutions financières internationales ne tomberont plus dans le piège des fausses promesses et des engagements non tenus, comme ce fût le cas avec les gouvernements précédents», avait dit Taboubi au ministre de l’Economie et des Finances, Ali Koôli, pour lui justifier les réticences du FMI. Il s’agit donc de s’entendre sur les mesures pratiques qui vont accompagner les grandes lignes du plan de réformes et qui concernent, surtout, la levée progressive de la subvention des produits alimentaires de base et de l’énergie. A ce titre, la centrale syndicale y est fermement opposée, puisque «cela touche le pouvoir d’achat des couches moyennes», a assuré Taboubi sur des plateaux de télévision publics. Donc, le FMI est convaincu que le consensus n’y est pas et les négociations piétinent. Si l’ambassadeur américain en Tunisie a averti que le temps presse, c’est parce qu’il sait que le Trésor tunisien est dans l’obligation de payer 840 millions de dollars en juin, deux échéances de prêts.
D’où ces divers voyages de Mechichi pour trouver du cash. Mais, Américains, UE et autres amis de la Tunisie débloquent des fonds pour des projets, qu’il est impossible d’utiliser pour honorer des échéances de prêts. C’est pour cela que le gouvernement tunisien attend impatiemment l’issue de l’actuelle visite de Mechichi à Doha avec l’éventualité de débloquer en juin deux milliards de dollars, sous forme de dépôt à la Banque centrale.
Les Libyens ont fait la même promesse. Mais, «ce sont des solutions instantanées», relèvent tous les experts économiques, qui appellent à un plan de réforme de la politique économique, pour tenter de sauver la Tunisie.