ÇA NE VOLE PAS HAUT !
L Si quelques rares formations politiques tentent d’expliciter aux potentiels électeurs leurs programmes, beaucoup se sont en revanche illustrées par des déclarations ayant provoqué des polémiques ou de la moquerie.
Les discours de campagne de certains candidats aux législatives du 12 juin 2021 sont parfois marqués par des dérives sexistes ou racistes qui, pour les observateurs, renseignent sur le niveau politique et éthique de leurs auteurs
Des références à la religion et à la région sont, par ailleurs, faites par les hommes politiques engagés dans la campagne alors que la loi interdit toute utilisation du culte pour faire de la réclame électorale.
La campagne électorale pour les élections législatives du 12 juin prochain est à sa deuxième semaine. Si quelques rares formations politiques tentent d’expliciter aux potentiels électeurs leurs programmes, notamment sur les réseaux sociaux, beaucoup se sont par contre illustrées par des déclarations ayant provoqué des polémiques ou de la moquerie. Dans ce sens, c’est le président du Front de la bonne gouvernance (FBG), Aissa Belhadi, qui a été le plus cité ces derniers jours à cause des propos qu’il avait tenus le 25 mai dernier, lors d’un meeting, lorsqu’il a qualifié les femmes candidates qui sont dans les listes de son parti de «fraises sélectionnées». Des propos qui n’ont été bien évidemment pas appréciés, même si leur auteur a tenté de s’excuser deux jours plus tard. Belhadi n’est pas, bien entendu, le seul à s’être illustré par des déclarations tonitruantes depuis le début de la campagne électorale. Tayeb Zitouni, le secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), un parti normalement rompu au discours de campagne, a «révélé», en début de semaine, depuis Biskra, que cette wilaya était «la troisième ville sainte de l’islam», après La Mecque et Médine, et ce, enchaîne-t-il, «parce que 300 compagnons du Prophète, dont Okba Ibn Nafaa, y sont décédés». Une déclaration qui a fait exploser l’applaudimètre dans la salle où se tenait le meeting. Abdelkader Bengrina, chef du parti islamiste El Bina, a lui affirmé, depuis Tlemcen, que l’international algérien Riyad Mahrez était «un moudjahid pour la cause divine». Celui-ci commentait, selon toute vraisemblance, le fait que le joueur ait brandi le drapeau palestinien, dimanche dernier, à l’Ittihad Stadium, en Angleterre, lors de la célébration du titre de champion remporté par son club, Manchester City. Les autres déclarations de responsables de parti qui sont en train de faire le buzz sur le net sont liées à l’interprétation, parfois religieuse, qu’ils font des chiffres qui leur ont été attribués par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE). Depuis Djelfa, Abou El Fadhl Baadji, premier responsable du Front de libération nationale (FLN), dont le dossier de candidature a été rejeté, faut-il le rappeler, s’est longuement attardé sur le «7», le chiffre de son parti. «C’est un message divin», d’après lui, le «7» représentant les «sept cieux» ou «le nombre de tours qu’un pèlerin doit faire autour de la Kaâba». C’est également, dirat-il, le «nombre d’années qu’a duré la Guerre de Libération nationale».
Le «4» du Mouvement de la société pour la paix (MSP) renvoit, selon le président de cette formation politique, Abderazak Makri, à la motorisation «4x4». Lakhdar Benkhellaf, responsable et ex-député du Front El Adala, présidé par Abdallah Djaballah, a déclaré que le «14», attribué à son parti, «est le numéro de la Protection civile». «Nous allons éteindre les feux de la îssaba», a-t-il lancé. Il est incontestable que dans le contexte actuel, où une partie de la population conteste ce rendez-vous électoral, la moindre déclaration de travers faite par un candidat, comme c’est le cas pour quelques affiches ubuesques, est largement commentée et relayée. Néanmoins, il faut dire que la qualité de beaucoup de candidats à la députation laisse aussi à désirer. Le débat autour des questions sérieuses, politiques ou économiques, non maîtrisées, laisse place donc à des déclarations farfelues qui ne font finalement que discréditer leurs auteurs.
Questionné jeudi dernier lors d’une conférence de presse au sujet de la déclaration faite par Aîssa Belhadi à propos des femmes candidates de son parti, le président de l’ANIE, Mohamed Charf i, a indiqué que «si la concernée s’est sentie diffamée, elle n’a qu’à se plaindre». «S’il y a un abus, nous allons adresser un avertissement», a-t-il ajouté, avant d’indiquer, en dernier lieu, que «jusque-là, le discours de haine, par exemple, n’est pas présent dans cette campagne». Entre-temps, des candidats multiplient les «errements» qui rappellent bien les scènes «hallucinantes» qui se sont passées devant le ministère de l’Intérieur lorsque des «candidats» se présentaient sur place pour retirer des formulaires de candidature pour les présidentielles annulées d’avril et juillet 2019.