114 civils tués dans deux attaques meurtrières
L Le 14 mai, le ministre de la Défense, Chériff Sy, et des membres de la hiérarchie militaire se sont rendus à Sebba, assurant que la situation est revenue à la normale, après de nombreuses opérations militaires.
Au moins 114 civils ont été tués en quelques heures dans la nuit de vendredi à samedi, lors de deux attaques dans le nord du Burkina Faso, dont l’une a fait une centaine de morts, rapporte l’AFP citant des sources officielles et locale. Ces attaques ont été commises dans la zone dite «des Trois frontières» entre Burkina, Mali et Niger, régulièrement ciblée par des assauts meurtriers de djihadistes présumés liés à Al Qaîda et à l’Etat islamique (EI) contre des civils et des militaires. «Dans la nuit de vendredi à samedi, des individus armés ont mené une incursion meurtrière à Solhan, dans la province du Yagha. Le bilan, toujours provisoire, est d’une centaine de personnes tuées, des hommes et des femmes», a indiqué une source sécuritaire. L’attaque et le bilan «provisoire» sont confirmés par le gouvernement qui précise, dans un communiqué, que les victimes sont des «civils sans distinction d’âge, tués par les terroristes» et que «plusieurs habitations et le marché (de Solhan) ont été incendiés». En la circonstance, un deuil national de 72 heures, à compter de ce jour, 5 juin, au lundi, est décrété, a ajouté le gouvernement. Selon une source locale, l’attaque «a d’abord visé le poste des Volontaires pour la défense de la patrie», (VDP), des supplétifs civils de l’armée, et «les assaillants ont ensuite visité les concessions (maisons) et procédé à des exécutions». Ils sont créés en décembre 2019 et interviennent aux côtés des forces armées pour des missions de surveillance, d’information et de protection, après une formation militaire de 14 jours.
Solhan est une petite localité située à une quinzaine de kilomètres de Sebba, chef-lieu de la province du Yagha, qui a enregistré de nombreuses attaques attribuées à des djihadistes ces dernières années. Le 14 mai, le ministre de la Défense, Chériff Sy, et des membres de la hiérarchie militaire se sont rendus à Sebba, assurant que la situation est revenue à la normale, après de nombreuses opérations militaires. Cette attaque en a suivi une autre, menée tard vendredi, sur un village de la même région, Tadaryat, au cours de laquelle au moins 14 personnes, dont un supplétif civil, ont été tuées.
Depuis 2015, le Nord, la capitale Ouagadougou et l’Est connaissent régulièrement des enlèvements, dont ceux d’Occidentaux, ainsi que des attaques perpétrés par des groupes djihadistes affiliés à Al Qaîda ou à l’organisation Etat islamique (EI). Le 15 janvier 2016, un attentat contre l’hôtel Splendid et le restaurant Cappuccino à Ouagadougou fait 30 morts, majoritairement des Occidentaux. L’attentat, premier de ce type dans le pays, est revendiqué par le groupe djihadiste Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI), qui l’attribue au groupe Al Mourabitoune de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar. Le 7 février 2017, l’opposition critique le président Kaboré, jugeant sa gestion. En novembre, la force antidjihadiste de l’organisation régionale G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), soutenue par la France, a lancé ses premières opérations conjointes aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger.
Le 2 mars 2018, des attaques simultanées visent l’état-major et l’ambassade de France : huit militaires sont tués. L’attentat est revendiqué par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al Qaîda. Pour la première fois, les assaillants ont utilisé une voiture piégée. Fin 2018, l’état d’urgence est décrété dans plusieurs provinces. A partir de 2019, les attaques deviennent quasi quotidiennes. En début d’année, le chef d’état-major général des armées est limogé, un nouveau gouvernement est formé, puis l’armée réorganisée. En mai, les gouverneurs des régions en proie à des attaques djihadistes sont limogés. Le 19 août, 24 soldats sont tués dans l’attaque d’une base militaire à Koutougou (nord), près du Mali. Le 6 novembre, au moins 38 personnes sont tuées et 63 blessées dans l’attaque d’un convoi transportant des employés de la mine d’or de Boungo, exploitée par une société canadienne dans l’Est. Le 24 décembre, 200 djihadistes attaquent la base militaire et la ville d’Arbinda, près du Mali, faisant 42 morts. Le 25 janvier 2020, un massacre fait 39 morts sur un marché du village de Silgadji (nord), où des hommes sont exécutés après avoir été séparés des femmes. Ce massacre intervient moins d’une semaine après l’attaque des villages de Nagraogo et Alamou (province de Sanmatenga), où les assaillants ont tué 36 civils. En août, le code électoral est modifié pour que les élections de novembre puissent être validées, même si elles ne peuvent se tenir sur tout le territoire en raison de l’insécurité. Le 26 avril dernier, deux journalistes espagnols et un militant écologiste irlandais sont exécutés alors qu’ils se trouvaient avec une patrouille antibraconnage attaquée dans l’Est. Le 3 mai, au moins 25 civils sont tués dans l’attaque du village de Kodyel, dans la commune de Foutouri (est).
Amnay Idir ENGRENAGE CASUS BELLI