La grande difficulté réside dans le manque de coopération internationale
La Convention des Nations unies contre la corruption (convention UNCAC, ou convention de Merida) a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 31 octobre 2003. A ce jour, elle a été ratifiée par 158 États, dont l’Algérie, qui compte parmi les premiers États signataires de la Convention des Nations unies contre la corruption. En effet, la Convention a été ratifiée le 25 août 2004, puis traduite concrètement dans la loi n°06-01 du 20 février 2006, relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. La convention UNCAC constitue donc le premier instrument juridique mondial en matière de lutte contre la corruption et stipule clairement que la restitution des avoirs détournés est un principe fondamental du droit international. Cette convention admet la similitude entre corruption et grande criminalité et pose comme principe que l’argent venant d’agents publics (responsables politiques, fonctionnaires nationaux ou internationaux et, plus généralement, toute personne exerçant une importante fonction publique dans son pays) – ce que le Groupe d’action financière (GAFI) va qualifier dans sa recommandation n° 6 de personnes politiquement exposées – doit faire l’objet d’une attention particulière de la part des intermédiaires et agents financiers (banques, fonds de placements, agents de change, sociétés d’assurances, avocats, notaires…). Elle légalise le principe de gel et de saisie d’avoirs supposés fruits d’actes de corruption (chapitre iii article 31). Les États signataires s’engagent à coopérer dans les actions judiciaires (enquêtes, extraditions…). Enfin et surtout, la convention pose comme principe fondateur la restitution des biens spoliés (chapitre v article 51). Toutefois, en vertu de l’article 55 portant sur la coopération internationale aux fins de confiscation, les moyens d’action en vue de les recouvrer sont à la seule disposition de l’État victime. Deux difficultés majeures peuvent constituer alors des entraves à la restitution des avoirs détournés : i) des mesures nationales inadaptées et ii) un manque de coopération internationale. L’Algérie ne souffre pas pour autant de l’inadaptabilité des mesures législatives et réglementaires dans la mesure où le droit positif, notamment le code des procédures pénales et la loi 06-01, semble permettre à l’Etat de réclamer la confiscation des avoirs criminels auprès des pays étrangers. De plus, il permet aux décisions judiciaires étrangères ordonnant la confiscation de biens mal acquis, d’être exécutoires sur le territoire national conformément aux règles et procédures établies (art. 63 de la loi 06-01). La grande difficulté réside essentiellement dans le manque de coopération internationale, lequel est très souvent aggravé par l’inexistence ou l’inadaptabilité des dispositifs internes, au sein de ces États étrangers, pour régler les modalités de blocage, de confiscation et de restitution de valeurs patrimoniales résultant des actes criminels tels que la corruption et le blanchiment d’argent. Donc, l’espace territorial dans lequel État requérant souhaite exécuter ses sentences peut s’avérer très déterminant pour la récupération des fonds détournés. Il importe de souligner ici que le fait qu’un Etat ait ratifié la convention UNCAC ne garantit pas une application rigoureuse de cette dernière. Prenons le cas de la France par exemple : elle est le premier pays du G8 à avoir ratifié, le 4 juillet 2005, la convention des Nations unies contre la corruption et avait, de surcroît, ratifié auparavant tous les autres instruments internationaux de lutte contre la corruption, notamment la convention de l’OCDE sur la corruption d’agents publics étrangers et les conventions du Conseil de l’Europe. Celles-ci ont été correctement transposées en droit interne et la France dispose d’un arsenal législatif complet en matière de lutte contre la corruption. Malheureusement, en matière de restitution des avoirs, la mise en oeuvre de la convention UNCAC laisse à désirer. Mis à part le yacht de Saddam Hussein – restitué par la France à l’Irak en juillet 2008, après que le Tribunal de commerce de Nice avait décidé de le saisir à la demande de l’État irakien– la France n’a procédé à la restitution d’aucun autre bien. Néanmoins, il y a d’autres Etats où la récupération des bien mal acquis semble plus facile et moins compliquée, comme la Suisse, par exemple, qui s’est imposée comme une référence en matière de gel et de restitution des avoirs. La moitié des procédures de restitution ayant à ce jour abouti est d’ailleurs à mettre à son crédit. La loi suisse, dite loi Duvalier, entrée en vigueur le 1er février 2011, est venue renforcer le dispositif pour régler les modalités de blocage, de confiscation et de restitution de valeurs patrimoniales de personnes politiquement exposées ou de leur entourage, lorsqu’une demande d’entraide judiciaire internationale en matière pénale ne peut aboutir en raison d’une situation de défaillance de l’État requérant. Les valeurs patrimoniales ainsi confisquées seront ensuite restituées par la Suisse au bénéfice de la population du pays d’origine. Pour que la récupération des avoirs mal acquis soit possible, il ne suffit pas que le pays requérant soit doté d’une législation interne qui encadre, de fond en comble, cette procédure aussi complexe que périlleuse, mais il faudrait également espérer que l’Etat dans lequel se situent les biens détournés soit signataire de la convention UNCAC. Faudrait-il encore que ce dernier soit prédisposé à faciliter la restitution des avoirs mal acquis pour peu que sa législation interne ne présente pas d’insuffisances bloquantes dans son mécanisme de confiscation et de restitution des biens détournés au profit du pays requérant.