Une arrestation et des interrogations !
● Interpellés jeudi en fin d’après-midi par des agents de la sécurité intérieure (DGSI), ils ont été relâchés après plusieurs heures passées dans les locaux de ce service.
Les journalistes, Ihsane El Kadi et Khaled Drareni ainsi que le porteparole de l’UDS, Karim Tabbou, ont retrouvé, très tôt dans la matinée d’hier, leur liberté. Interpellés jeudi en fin d’après-midi par des agents de la sécurité intérieure (DGSI), ils ont été relâchés après plusieurs heures passées dans les locaux de ce service. Jusqu’à hier, l’opinion nationale ignorait toujours les raisons de la vague d’arrestations qui a visé des journalistes et des activistes à la veille des élections législatives qui ont eu lieu hier. Seul Ihsane El Kadi, directeur d’Interface Média, a publié un communiqué sur le site Maghreb Emergent, dans lequel il est revenu longuement sur les conditions de sa détention qui aura duré plus de 30 heures. Selon lui, «il ne comprend toujours pas pourquoi il a été interpellé» et que «ceux qui l’ont interrogé ne lui ont rien expliqué». «J’ai été arrêté le jeudi 10 juin à 17h45 en bas du siège de notre agence à la place Audin et conduit dans un fourgon banalisé à la caserne Antar de la DGSI à Hydra. J’ai eu, en arrivant, un long échange intellectuel avec le colonel qui a suivi mon dossier consistant à savoir si l’Algérie était mûre ou pas encore pour la démocratie. Un interrogatoire formel a ensuite débuté à 22h passées avec d’autres officiers pour rapidement buter sur mon refus de répondre à quoi que ce soit tant que je ne savais pas pourquoi j’étais interpellé», indique-t-il, précisant qu’il avait été «dépossédé de son téléphone, confisqué dès son interpellation, et de ses objets personnels». «Ce refus de répondre s’appuyait également sur le fait que j’avais déjà séjourné pendant 6 heures au même endroit et selon le même procédé de l’interpellation dans la rue, le jeudi 18 juin 2020 à partir de 18h. J’avais déjà, en cette circonstance, refusé le jeu des questions-réponses invasif et refusé de signer le procès-verbal. Mon statut mal défini a alors changé ce jeudi à 22h30. L’interrogatoire s’est interrompu à 2h du matin pour reprendre vendredi en milieu de matinée, puis se poursuivre en deux séquences l’après-midi», raconte-t-il. Ihsane El Kadi affirme avoir répondu, en revanche, à des questions portant sur «le financement d’opérations précises : le prix Ali Bey Boudoukha par le recours au Crowdfunding sur la plateforme Kisskiss bank bank pour récompenser le meilleur article d’investigation (organisé en 2014, 2017 et 2019 par Maghreb Emergent) ; la formation en 2015 de journalistes de Radio M dans le cadre du projet Ibtycar de CFI, au même titre que d’autres médias algériens, dont des médias publics». Il précise aussi qu’il avait refusé «de répondre à une question sur l’origine du texte de la pétition publiée, le jeudi 10 juin, sur le site de Radio M dénonçant ‘‘le fait accompli’’ des élections législatives sous état de siège non déclaré comme un fait aggravant la crise politique». «(…) J’ai quitté la caserne Antar à minuit passé sans savoir très bien pourquoi j’ai été détenu pendant 30 heures, et si des suites judiciaires sont prévues. Ce sentiment, même tempéré par le traitement plein d’égards de mes ‘‘hôtes’’, m’indigne au plus haut point. Je suis déjà sous contrôle judiciaire suite à une plainte du ministre de la Communication,
Amar Belhimer, pour le contenu d’un article d’analyse politique, une première dans l’histoire du pays après le 5 Octobre», dénonce-t-il, rappelant que «le journalisme, l’édition de presse électronique et l’expression des opinions ne sont pas un crime». «Ce sont des libertés garanties par la Constitution algérienne, même celle de Abdelmadjid Tebboune. L’acharnement sécuritaire et judiciaire que je subis depuis un an dans la continuité de l’emprisonnement de Khaled Drareni et de la censure de nos deux sites d’information doit cesser. Il ne peut pas empêcher la pratique du journalisme indépendant et de la libre citoyenneté. Et il ne l’empêchera pas», lance-t-il.