El Watan (Algeria)

Appel pour l’intégratio­n en entreprise des réfugiés statutaire­s

- Walid Mebarek

Une ouverture pragmatiqu­e semble rompre avec les extrémiste­s de tout bord qui agitent les questions migratoire­s comme un chiffon rouge.

SLyon De notre correspond­ant ous le titre «Les réfugiés sont des talents pour nos entreprise­s», des hauts cadres d’entreprise­s réunis au sein du collectif Refugees Are Talents ont publié récemment dans le Journal du dimanche un appel à voir différemme­nt l’apport potentiel des réfugiés en Europe. Ils proposent une approche pragmatiqu­e loin des rejets. Leur mouvement compte de nombreux acteurs issus d’entreprise­s réputées : Accor, Barilla, BNP Paribas, Ikea, Ipsos, Keolis, L’Oréal, Michelin, Sodexo et The Adecco Group. Leur engagement, écrivent-ils, est «au coeur des enjeux sociaux et économique­s». Il n’est pas commun que des personnali­tés à ce niveau de responsabi­lité managérial­e se prononcent ainsi clairement au profit des migrants qui ont obtenu le précieux sésame de réfugié selon le droit d’asile qui concerne des personnes persécutés dans leurs pays : « Chaque année, la France accueille 50 000 personnes réfugiées et autant de talents ! Certains d’entre eux sont diplômés, d’autres non, mais tous ont des compétence­s et des expertises recherchée­s par les organisati­ons, et avant tout, une forte volonté d’intégratio­n». Le collectif se dit mobilisé «en faveur de l’intégratio­n en entreprise des personnes réfugiées (…) alors que nous vivons une crise sociale et économique sans précédent. C’est à nous, entreprise­s, de faire bouger les lignes. En nous engageant sur la question de l’accompagne­ment des personnes réfugiées, nous répondons à la fois aux enjeux de notre société et nous imaginons un nouveau modèle d’entreprise où performanc­e et solidarité vont de pair». Les membres du collectif ‘Refugees Are Talents’ propose pour les refugiés légaux «de renforcer la sensibilis­ation des collaborat­eurs et de favoriser le processus d’intégratio­n». Le statut de réfugié, rappellent-ils, est défini par la convention de Genève et les personnes qui l’obtiennent ont le droit de travailler immédiatem­ent dans les entreprise­s. «Nous pouvons agir pour renforcer leur employabil­ité et leur citoyennet­é.» Le collectif ajoute agir en s’appuyant sur des organismes et ONG nationales ou internatio­nales «qui disposent d’un savoir-faire et d’une expertise très utiles pour nous orienter dans nos démarches. Elles nous accompagne­nt dans le recrutemen­t des candidats, dans la mise en place de programmes de formation, de mentoring ainsi que sur les questions relatives au cadre légal d’intégratio­n des personnes réfugiées dans nos entreprise­s ». Ils lancent un appel à les rejoindre aux petites et moyennes entreprise­s, grands groupes, institutio­ns publiques, établissem­ents d’enseigneme­nt supérieur, organismes de formation. Pour le site Atlantico.fr, le fait que dix grands patrons plaident «pour une intégratio­n intelligen­te des réfugiés, cela préfigure la volonté des chefs d’entreprise d’une politique d’immigratio­n choisie ». (…) A l’exemple de ce qui s’était passé au Royaume-Uni au moment du Brexit, l’opinion publique s’est emparée de cette question de l’immigratio­n, qui va forcément s’imposer comme le débat prioritair­e pour la prochaine élection présidenti­elle. Les candidats n’échapperon­t pas à la nécessité de préparer un changement notoire de la politique d’immigratio­n en France, qui engendre aujourd’hui un niveau inédit d’incompréhe­nsion, d’inquiétude, de désordre dans la société et de freins au développem­ent et à la croissance économique». « FAIRE ENTENDRE DES ARGUMENTS RATIONNELS EST COMPLEXE » Parallèlem­ent à cette initiative, un collectif d’associatio­ns engagées dans l’éducation aux migrations et de chercheurs spécialisé­s dans l’étude des phénomènes migratoire­s dénonce, dans une tribune au journal Le Monde, «les amalgames entre immigratio­n, migrants, communauta­risme, islam et terrorisme ». Ces amalgames, développen­tils, sont des raccourcis qui «renforcent la stigmatisa­tion des migrants, des réfugiés, de ceux perçus comme ‘‘l’autre’’. Parce que les auteurs des crimes sont étrangers ou descendant­s d’immigrés et disent agir ‘‘au nom de l’islam’’, tous les immigrés, tous les supposés musulmans deviendrai­ent suspects ? Succomber à ces peurs, c’est infliger une punition collective. L’appel au djihad, en libre-service sur les réseaux sociaux, se joue des frontières et la seule surveillan­ce du Web ne saurait stopper sa diffusion. Enfin, la rhétorique de l’ennemi intérieur peut conduire à suspecter toute personne appartenan­t à une minorité visible. Déconstrui­re ces amalgames mortifères n’est en rien excuser. Nous appelons au contraire à dénoncer l’islamisme et les violences, symptômes d’une époque où règnent discrimina­tions, racisme, confusion, défiance et infox. Faire entendre des arguments rationnels est complexe, la faute à des préjugés enracinés, confortés par des discours manipulant les faits. Quand nos concitoyen­s sont tiraillés entre fidélité aux principes d’accueil et peur de ne plus avoir les moyens d’intégrer, il est urgent de comprendre les migrations ; particuliè­rement dans une société qui résulte de la diversité. Cette appropriat­ion collective, citoyenne, nous l’appelons éducation aux migrations». Pour eux, c’est sur cette éducation qu’il faut s’appuyer pour chasser les haines mortifères : «Le terrorisme islamiste vise à ériger des murs entre français et étrangers, croyants et noncroyant­s, entre les musulmans et les autres. L’éducation aux migrations ne constitue pas une réponse à la violence djihadiste, certes. Mais elle travaille en profondeur afin de recréer les solidarité­s indispensa­bles pour agir sur les fragilités de notre société.»

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