Plaidoyer pour une grâce présidentielle
Il n’y a, jusque-là, aucun signe qui laisse supposer que cela se concrétisera, mais nombre de faits importants plaident fortement pour qu’interviennent des signaux forts de détente politique, côté pouvoir bien entendu. Le premier, d’ordre symbolique, est la commémoration du 59e anniversaire de l’indépendance du pays, moment à tout jamais gravé dans l’inconscient collectif des Algériens comme rupture avec le douloureux passé colonial, point de départ du recouvrement des libertés spoliées et retour à la paix, prélude à la reconstruction d’une Algérie algérienne. Maintes fois, les différents régimes qui se sont succédé à la tête du pays ont saisi cette opportunité pour communier avec leur peuple, notamment à travers des mesures d’apaisement politiques et publiques, parmi elles, la plus significative, la grâce accordée à des détenus. Rien n’empêche que cela intervienne de nouveau ce 5 juillet 2021 qui, par un hasard du calendrier, est le point de départ de l’installation d’une nouvelle Assemblée nationale qu’accompagne une reconfiguration de l’Exécutif dans le sillage d’un remaniement du gouvernement. Si les autorités attachent beaucoup d’importance à cette séquence politique, à leurs yeux déterminante dans leur stratégie globale, elles ne peuvent ignorer la caution de l’opinion publique, profondément divisée sur cette question. Il s’avère donc utile – et vital – pour elles de proposer aux Algériens une autre vision des choses, d’aller vers eux, plus particulièrement ceux qui ont tourné le dos au processus électoral. C’est une tâche certes ardue, tant se sont sédimentées les rancoeurs, les incompréhensions et les hostilités, mais elle n’est pas insurmontable dès lors que sont lancés des signaux forts, le premier d’entre eux, objet de notre propos, à portée de main du président de la République. Il s’agit de rééditer le geste fort effectué au lendemain du retour de son séjour médical d’Allemagne, une grâce touchant une grande partie des détenus d’opinion. Elle a été appréciée par l’opinion publique, mais malheureusement n’a pas mis fin à l’incarcération de citoyens de toutes tendances et de divers horizons, la plupart pour des activités liées directement ou indirectement au hirak. Ils sont aujourd’hui près de 300, sous divers chefs d’accusation très lourds, certains déjà condamnés, d’autres dans l’attente de leur procès. Même des journalistes figurent parmi eux. Le chef de l’Etat a toute latitude de mettre fin à cette situation qui déstabilise le tissu social et gêne les autorités gouvernementales. Une épine du pied enlevée, elles pourront se concentrer sur d’autres dossiers brûlants, notamment la grave crise sociale et économique qui affecte la population, dont le moral est extrêmement bas. Idem pour les députés récemment élus. La nouvelle classe politique ne pourra travailler dans la sérénité et l’efficacité que si le dossier des détenus d’opinion est clos. Ils doivent regagner leur foyer, les prisons se vider et ne plus s’ouvrir à quiconque émet un point de vue contradictoire. Monsieur le Président, en ce 5 juillet, jour de la victoire et de la liberté, redonnez de l’espoir et de la joie à des centaines d’enfants, de mères, de pères et d’épouses.