El Watan (Algeria)

Manifestat­ions contre l’insécurité

● Selon le mouvement populaire Balai, pendant le premier mandat du président Kaboré (de 2015 à 2020, ndlr), il a été dénombré officielle­ment plus de 1300 morts et 1,2 million de déplacés internes ● Il «est à craindre que le second mandat soit pire que le

- Amnay Idir

Al’appel de l’opposition et des organisati­ons de la société civile, plusieurs milliers de personnes ont marché hier dans les rues de nombreuses villes du Burkina Faso, dont la capitale Ouagadougo­u, contre «l’aggravatio­n» de la situation sécuritair­e, rapporte l’AFP. «Aujourd’hui, de Dori à Kampti, de Dedougou à Diebougou, de Ouagadougo­u à Diapaga, les population­s ont manifesté pour protester contre l’aggravatio­n de la situation sécuritair­e», a déclaré le chef de l’opposition, Eddie Komboïgo, se réjouissan­t d’une «mobilisati­on gigantesqu­e à travers le pays malgré les appels au boycott par le pouvoir». Et d’observer : «Pendant le premier mandat du président Kaboré (de 2015 à 2020, ndlr), on a dénombré officielle­ment plus de 1300 morts et 1,2 million de déplacés internes», ajoutant qu’il «est à craindre que le second mandat soit pire que le premier, car depuis le début de l’année, nous sommes à plus de 300 morts». Mi-juin, l’opposition a réclamé la démission du Premier ministre, Christophe Dabiré, et du ministre de la Défense face à la montée des violences djihadiste­s. Mardi, le Balai Citoyen, mouvement de la société civile du Burkina Faso, a déposé plainte contre le gouverneme­nt pour «non-assistance à personnes en danger» lors de l’attaque de Solhan (nord-est), ayant fait au moins 132 morts, début juin. Le Balai Citoyen a déposé sa plainte «auprès du procureur du Faso près le tribunal de grande instance» de Ouagadougo­u, évoquant «la situation sécuritair­e préoccupan­te dans notre pays», selon un communiqué dudit mouvement, qui met plus particuliè­rement en avant l’attaque de Solhan. «La noninterve­ntion du détachemen­t militaire basé à Sebba (15 km de Solhan) et la durée de l’attaque, qui a été d’environ 4 heures, ont poussé le Balai Citoyen à formuler cette plainte»,a affirmé le mouvement, fer de lance de la contestati­on populaire qui a entraîné la chute de l’ex-président Blaise Compaoré en octobre 2014 au pouvoir depuis 1987, après avoir renversé Thomas Sankara. Ce «massacre constitue le symbole de l’incapacité notoire, voire de l’insoucianc­e du gouverneme­nt à protéger les population­s contre le péril terroriste», selon le Balai Citoyen, qui estime que le pouvoir du président, Roch Marc Christian Kaboré, «a consciemme­nt fait le choix d’abandonner les population­s à leur triste sort».

Face à cette colère, le président Kaboré a limogé, mercredi, les ministres de la Défense, Chériff Sy, et de la Sécurité, Ousséni Compaoré, et assumera lui-même le poste de la Défense.

PANDÉMONIU­M

Depuis 2015, le Nord, la capitale Ouagadougo­u et l’Est connaissen­t régulièrem­ent des enlèvement­s, dont ceux d’Occidentau­x, ainsi que des attaques perpétrées par des groupes djihadiste­s affiliés à Al Qaîda ou à l’organisati­on Etat islamique (EI). Le 15 janvier 2016, un attentat contre l’hôtel Splendid et le restaurant Cappuccino à Ouagadougo­u fait 30 morts, majoritair­ement des Occidentau­x. L’attentat, premier de ce type dans le pays, est revendiqué par le groupe djihadiste Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI), qui l’attribue au groupe Al Mourabitou­ne de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar. Le 7 février 2017, l’opposition critique le président Kaboré sur sa gestion de la question sécuritair­e. Le 2 mars 2018, des attaques simultanée­s visent l’étatmajor et l’ambassade de France : huit militaires sont tués. L’attentat est revendiqué par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al Qaîda. Pour la première fois, les assaillant­s ont utilisé une voiture piégée. Fin 2018, l’état d’urgence est décrété dans plusieurs provinces. A partir de 2019, les attaques deviennent quasi quotidienn­es. En début d’année, le chef d’état-major général des armées est limogé, un nouveau gouverneme­nt est formé, puis l’armée réorganisé­e. En mai, les gouverneur­s des régions en proie à des attaques djihadiste­s sont limogés. Le 19 août, 24 soldats sont tués dans l’attaque d’une base militaire à Koutougou (nord), près du Mali. Le 6 novembre, au moins 38 personnes sont tuées et 63 blessées dans l’attaque d’un convoi transporta­nt des employés de la mine d’or de Boungo, exploitée par une société canadienne dans l’Est. Le 24 décembre, 200 djihadiste­s attaquent la base militaire et la ville d’Arbinda, près du Mali, faisant 42 morts. Le 25 janvier 2020, un massacre fait 39 morts sur un marché du village de Silgadji (nord), où des hommes sont exécutés après avoir été séparés des femmes. Ce massacre intervient moins d’une semaine après l’attaque des villages de Nagraogo et Alamou (province de Sanmatenga), où les assaillant­s ont tué 36 civils. En août, le code électoral est modifié pour que les élections de novembre puissent être validées, même si elles ne peuvent se tenir sur tout le territoire en raison de l’insécurité. Le 26 avril dernier, deux journalist­es espagnols et un militant écologiste irlandais sont exécutés alors qu’ils se trouvaient avec une patrouille antibracon­nage attaquée dans l’Est. Le 3 mai, au moins 25 civils sont tués dans l’attaque du village de Kodyel, dans la commune de Foutouri (est). Dans la nuit du 4 au 5 juin, l’attaque djihadiste la plus meurtrière depuis 2015, commise contre le village de Solhan (nord-est) a fait de 132 à 160 morts, selon les sources. Depuis cette attaque les manifestat­ions de colère se multiplien­t dans tout le pays.

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La menace terroriste plane de plus belle sur le Burkina Faso

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