RASSEMBLEMENT POUR DÉBAPTISER «BUGEAUD»
A l’initiative de l’universitaire Olivier Le Cour Grandmaison et du président de l’Association Les Oranges, M’hamed Kaki, un rassemblement a lieu le 18 juin 2021 devant la statue du maréchal Bugeaud, qui domine la façade nord du Louvre, le long de la rue de Rivoli à Paris. La date a été choisie en référence à celle des enfumades ordonnées par le colonel Pélissier, le 18 juin 1845, pour provoquer la mort par asphyxie des populations civiles algériennes qui s’y étaient réfugiées. Elles ont anéanti, conformément aux ordres du général Bugeaud, une tribu entière – celle des Ouled Riah - dont les membres s’étaient réfugiés dans les grottes du Dahra, proches de Mostaganem.
Alain Ruscio, dans le livre à paraître Paris colonial,
écrit : «Une polémique est née autour du nom de Bugeaud. Soit. La réputation de l’homme est détestable et en grande partie justifiée (et encore, n’évoque-t-on ici que ses crimes en Algérie). Il est pourtant une victime posthume de sa notoriété. S’il avait un peu moins lié son nom aux mariages au tambour (ces mises en scène où de solides paysannes de la France profonde se jetaient dans les bras de soldats sans même les connaître : il fallait bien peupler l’Algérie d’une ‘‘race nouvelle’’), s’il n’avait été le premier à rire de la chanson ‘‘La casquette du père Bugeaud’’, il serait peut-être oublié aujourd’hui. Car les noms qui exaltent dans la capitale les acteurs – les sabreurs – de la conquête de l’Algérie, dont on sait aujourd’hui que le bilan pour les populations indigènes fut effroyable (exécutions de masse, enfumades, razzias), sont nombreux : Damrémont, le duc d’Aumale, Changarnier,
Lamoricière, déjà cité, et jusqu’à un homme qui occupa ensuite la magistrature suprême, le maréchal de Mac Mahon. Ajoutons que si, on débaptise l’avenue Bugeaud, il faut en toute logique mettre à bas sa statue qui domine la façade nord du Louvre, le long de la rue de Rivoli. Oui, mais alors en toute équité, se débarrasser de ses encombrants compagnons qui ont participé à la conquête de l’Algérie : Cavaignac, Damrémont, le duc d’Aumale et Lamoricière, sous réserve d’un recensement exhaustif, ne dominent-ils pas, eux aussi, avec arrogance, la rue de Rivoli depuis plus d’un siècle ?»