Les avocats dénoncent une «justice des instructions»
Les avocats du barreau d’Alger ont tenu, hier, un rassemblement devant le tribunal de Sidi M’hamed (Alger) pour dénoncer les «persécutions» qu’ils subissent et pour exiger «la protection des droits de la défense». Des dizaines d’avocats, en toge, brandissaient des affiches sur lesquelles on pouvait lire : «Pas de justice sans les droits de la défense», «Assez du mépris et des dépassements», «Où est l’Etat de droit ?» «Libérez notre confrère Arslane». Prenant la parole au milieu de ses confères, le bâtonnier d’Alger, Me Abdelmadjid Sellini, très remonté, a dénoncé une «justice des instructions» qui perpétue la «hogra» que subiraient les robes noires. «L’Algérie a besoin d’une justice réelle, pas d’une justice des instructions, pas d’une justice du téléphone, ni d’une justice de l’abus, de la hogra ou de l’acharnement. Y en a marre ! Barakat !» s’offusque Me Sellini. Ses confrères lanceront à tue-tête : «Barakat, barakat de la justice des instructions !»
Un dispositif policier avait été déployé aux abords de l’édifice de la rue Abane Ramdane pour «contenir» les avocats sur une portion de la chaussée. Le rassemblement d’hier intervient suite à un incident enregistré au tribunal de Dar El Beïda (Alger) : un avocat a vu son véhicule «séquestré» à l’intérieur du tribunal. Le bâtonnier qui s’est déplacé sur place a dénoncé un «abus d’autorité» de la part du procureur adjoint, qui avait ordonné la mise en fourrière du véhicule. Dans un communiqué signé du bâtonnier, le barreau d’Alger a décidé le boycott du tribunal de Dar El Beïda pendant une semaine, une grève illimitée au niveau des tribunaux criminels de première instance et appelé à l’«arrêt général» de l’activité judiciaire au niveau de la cour d’Alger et de tous les tribunaux durant la journée d’hier. Il a annoncé également le boycott «jusqu’à nouvel ordre» de l’assistance judiciaire. Le bâtonnat regrette, dans son communiqué, l’«attitude hautaine et abusive de certains responsables au niveau de l’appareil judiciaire, qui refusent que les avocats soient des partenaires au sein de la justice algérienne». Le bâtonnat a rappelé, à cet effet, qu’il «n’attend pas de la reconnaissance de la part de ces gens, car ses droits sont consacrés par la Constitution et les lois de la République». Les avocats comptent «maintenir la pression» contre l’administration de la justice qui les «méprise». «Les dépassements que subissent les avocats dans l’exercice de leur métier est la preuve du mépris de certains responsables des instances judiciaires. Le métier est et restera marqué par les sacrifices des hommes à travers l’histoire du pays. Nous sommes et resterons les porte-voix des faibles», affirme Me Hafid Tamert, avocat engagé dans le bras de fer qui s’est installé depuis un moment avec le département de la justice.Nadir