Béjaïa résiste
Ils n’étaient pas nombreux hier à la 125e marche du vendredi à Béjaïa, mais les quelques centaines de fidèles au mouvement populaire, y compris des personnes âgées, étaient là, malgré l’usure, l’éparpillement, le désengagement… Malgré l’impasse ? Ils étaient là en tout cas malgré tout, avec les mêmes slogans d’il y a plus de 28 mois. Béjaïa fait de la résistance. Le rendez-vous a été honoré sous un ciel couvert, mais qui n’a rien changé au temps caniculaire et humide.
Ni la météo, ni l’installation du nouveau Parlement et encore moins la formation du nouveau gouvernement, formé après les législatives du 12 juin dernier, n’ont changé quelque chose à leur détermination à exiger que «le système dégage» et à ne pas oublier les plus de 300 détenus d’opinion, «Tileli i mehbas. Oulach smah oulach» (Liberté pour les détenus, pas de pardon). Que le nouveau ministre des Affaires étrangères, le revenant au même portefeuille ministériel, Ramtane Lamamra, soit originaire de la wilaya, d’Amizour précisément, ce n’est qu’un motif de plus pour adapter un des vieux slogans du «hirak». «Maranach habsine y ouled frança, djibou Lamamra, zidou atika !» (Nous n’arrêterons pas, enfants de la France, ramenez Lamamra, et même Bouteflika), a scandé le carré le plus bruyant de la marche, stigmatisant la continuité du régime Bouteflika. Comme pour manifester l’ignorance de la feuille de route du pouvoir qu’ils rejettent, les marcheurs se sont arrêtés à la convocation du seul nom de Lamamra. Celui de Samia Moualfi, la nouvelle ministre de l’Environnement, est ignoré. Ex-députée qui revient pour un deuxième mandat sous les couleurs du FLN, elle est le deuxième membre du nouvel exécutif issu de Béjaïa, originaire de Sidi Aïch. Mais sur les réseaux sociaux, on se marre que la wilaya qui a donné le taux insignifiant de 0,72% de participation aux dernières législatives ait deux ministres dans le gouvernement. Dans la rue, le rejet du nouveau Parlement demeure sans concession. «Barlamane el khawana !» (Parlement de traîtres) continue-t-on à crier. Et à ne reconnaître ni le gouvernement, ni le Parlement. «RND, FLN, houkouma, barlamane, dégage, dégage !» (RND et FLN, gouvernement et Parlement, dégagez), a-ton scandé hier parmi tant de slogans rythmés et appuyés par des applaudissements presque joyeux et que l’on répétera vendredi prochain.