Les sanctions américaines provoquent l’ire de la Chine
● Grâce à sa réglementation favorable aux entreprises, à son respect pour l’Etat de droit et à sa proximité avec le vaste marché intérieur chinois, Hong Kong est devenu l’un des principaux carrefours d’échanges commerciaux dans le monde.
Des actes d’intimidation «extrêmement grossiers» et «extrêmement déraisonnables» avec une «intention méprisable». C’est en ces termes que l’antenne du ministère chinois des Affaires étrangères à Hong Kong a qualifié hier les nouvelles sanctions de Washington contre sept responsables chinois qu’il accuse de saper l’Etat de droit à Hong Kong, a rapporté hier l’agence Reuters. Sanctions qui s’ajoutent à l’avertissement adressé par l’administration de Biden aux entreprises américaines sur les risques d’opérer dans le territoire de Hong Kong. Dans un communiqué publié tard vendredi, un porte-parole du commissaire du ministère chinois des Affaires étrangères à Hong Kong a fermement condamné les actions américaines, affirmant qu’elles constituaient une ingérence flagrante dans les affaires intérieures de Hong Kong et de la Chine. Ce même jour, un porte-parole du gouvernement de Hong Kong a déclaré que Washington a tenté à plusieurs reprises de calomnier la loi au cours de l’année dernière. La dernière tentative de l’administration américaine de publier un soidisant «avis (…) fondé sur des propos alarmistes totalement ridicules et infondés sur la situation à Hong Kong ne fait que prouver une fois de plus son hypocrisie et son double langage, motivés par une hégémonie idéologique», a déclaré le porte-parole dans un communiqué.
Les Etats-Unis ont imposé vendredi des sanctions contre des directeurs adjoints du bureau de liaison des affaires chinoises à Hong Kong. Washington a émis un avertissement à destination des entreprises américaines quant à l’existence de «risques croissants» pour leurs opérations à Hong Kong, après la mise en place de restrictions par Pékin visant ce centre financier historique. Les entreprises devraient «être conscientes de potentiels risques de réputation, réglementaires, financiers et dans certains cas judiciaires, associés à leurs opérations à Hong Kong», souligne l’avertissement. «Pékin a porté atteinte à la réputation de gouvernance transparente et de respect des libertés individuelles de Hong Kong, et rompu sa promesse de conserver le haut degré d’autonomie de Hong Kong inchangé pendant 50 ans», a affirmé le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, dans un communiqué cité par l’AFP. «Aujourd’hui, nous envoyons un message clair que les Etats-Unis se tiennent de manière résolue avec les Hongkongais», a ajouté le secrétaire d’Etat.
L’AVERTISSEMENT ET «LE FLEUVE DE L’HISTOIRE»
Le document reconnaît que Hong Kong, une ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997, «conserve beaucoup de différences économiques» par rapport au reste de la Chine, notamment de plus fortes protections de la propriété intellectuelle. Il met en exergue cependant un climat changeant avec la nouvelle loi sur la sécurité nationale, soulignant notamment l’arrestation d’un citoyen américain, John Clancey, un avocat réputé dans le domaine des droits humains. Un risque accru existe également pour les données privées, selon Washington, qui dénote un manque de transparence et d’accès à l’information, prenant pour exemple la fermeture d’un journal populaire, l’Apple
Daily, considéré comme une épine dans le pied des autorités. L’avertissement affirme en outre que les entreprises étaient davantage susceptibles d’encourir des sanctions américaines mises en place en réponse aux inquiétudes des Etats-Unis sur la situation des droits humains.
Des dizaines de personnes, comme le magnat des médias Jimmy Lai, ainsi que des élus et des militants pro-démocratie, ont été inculpées au nom de la nouvelle loi sur la sécurité nationale qui prohibe notamment la subversion. Pékin a imposé cette loi en juin 2020 après des manifestations de grande ampleur qui demandaient la sauvegarde des droits fondamentaux promis à Hong Kong avant la rétrocession de 1997. Les Etats-Unis ont déjà imposé des sanctions sur plusieurs officiels chinois, dont la plus haute responsable à Hong Kong, la pro-Pékin Carrie Lam. Le directeur du bureau chinois des affaires de Hong Kong et Macao, Xia Baolong, a souligné vendredi que des sanctions n’auraient pour résultat que de «provoquer notre colère». «Vous ne feriez rien d’autre que soulever un rocher pour le laisser tomber lourdement sur vos pieds», a-til déclaré. «Le long fleuve de l’histoire a prouvé un nombre incalculable de fois que la victoire doit appartenir à l’irréductible peuple chinois», a-t-il affirmé dans un discours.
Grâce à sa réglementation favorable aux entreprises, à son respect pour l’Etat de droit et à sa proximité avec le vaste marché intérieur chinois, Hong Kong est devenu l’un des principaux carrefours d’échanges commerciaux dans le monde. Depuis la mise en place de la nouvelle loi sur la sécurité nationale, un nombre croissant d’entreprises internationales ont annoncé leur intention de quitter Hong Kong, ou d’y réduire leur présence en salariés. Un sondage de la Chambre américaine de commerce à Hong Kong, une organisation indépendante d’entreprises, affirme que 42% de ses membres réfléchissent à quitter la ville ou comptent déjà le faire.
Les relations sino-américaines se sont fortement détériorées ces dernières années, Pékin affirmant de plus en plus son pouvoir à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières. Mais un responsable du département d’Etat a affirmé vendredi que les Etats-Unis «continueront à explorer les possibilités» de rencontres avec des représentants chinois, tant que les discussions sont «substantielles et constructives pour nos objectifs».