«Autodétermination de la Kabylie», une vieille rengaine de la diplomatie marocaine !
Cette attitude «revancharde» de la diplomatie onusienne des Marocains remonte, au moins, à plus de 10 ans Elle fait partie d’une stratégie globale, à la fois «agressive» et «pragmatique» contre l’Algérie en ce qui concerne le dossier du
En relançant la carte de l’ «autodétermination de la Kabylie» dans le débat, au sein des instances de l’Organisation des Nations unies (ONU), autour du dossier de l’autodétermination du Sahara occidental, le Maroc attaque frontalement l’Algérie à travers une offensive qui s’apparente à du chantage diplomatique, infantile et irresponsable vu les grandes tensions qui existent entre les deux pays depuis plusieurs mois.
En effet, contrairement à ce que peut penser une bonne partie de l’opinion publique nationale, la position du Maroc concernant le «projet d’autodéterminationde la Kabylie», porté par le mouvement MAK-GPK (Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie et Gouvernement provisoire kabyle), ne date pas d’hier. L’action «spectaculaire» de la représentation diplomatique marocaine à l’ONU, la semaine dernière, sous forme de distribution d’une «note officielle» soutenant un soi-disant «droit à l’autodétermination du peuple kabyle» aux membres du Mouvement des Non-Alignés est juste une étape de plus franchie. Il s’agit en fait d’une réaction, décidée par l’ambassadeur du Maroc à l’ONU, Omar Hilale, suite à la demande de l’Algérie, par le biais de son tout nouveau ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, d’intégrer la question du Sahara occidental dans les travaux.
Cette attitude «revancharde» de la diplomatie onusienne des Marocains remonte, au moins, à plus de 10 ans. Elle fait partie d’une stratégie globale
«agressive» contre l’Algérie en ce qui concerne le dossier du Sahara occidental. D’ailleurs, la normalisation des relations entre le royaume chérifien et l’Etat hébreu entre dans ce sillage. Elle est motivée par la même principale raison : légitimer coûte que coûte son occupation du Sahara occidental. C’est tellement évident que le grand journal israélien de gauche Haaretz avait titré ainsi cet événement : «Peace for peace ? Israel-Morocco deal is occupation in exchange for occupation» (La paix pour la paix ? L’accord israélo-marocain, c’est l’occupation en échange de l’occupation). Pour revenir à la Kabylie, en 2010, quelques mois seulement après l’autoproclamation du GPK à Paris, présidé depuis par Ferhat Mehenni, un représentant du Maroc à l’ONU a soulevé la question de «la persécution des activistes kabyles», en réponse à la demande de l’ambassadeur onusien algérien de respecter les résolutions sur le conflit sahraoui. De son côté – alors qu’il l’avait déjà fait dès janvier 2010, six mois avant la création du GPK –, Mehenni a réitéré en 2011 son soutien au «plan d’autonomie du Sahara», proposé et défendu par le Maroc, à l’occasion d’une visite au royaume. En 2015, Omar Rabi, délégué marocain aux travaux de la Troisième commission de l’ONU, a déclaré que «le peuple kabyle doit être accompagné pour qu’il puisse jouir de ses droits légitimes à l’autodétermination et à l’autonomie». Lors d’une conférence de presse à New York en 2017, Omar Hilale, représentant permanent du Maroc à l’ONU, souleva de nouveau «la question de la Kabylie et de la région du M’zab». Du côté du MAK-GPK, rien de nouveau non plus.
Lors de l’épisode de 2015, Mehenni a publié un communiqué pour adresser «ses remerciements au royaume du Maroc, à son peuple et, à leur tête, sa majesté le roi Mohammed VI». Il y annonçait alors que son organisation allait déposer une demande auprès des Nations unies pour la tenue d’«un référendum d’autodétermination de la Kabylie». Cette fois-ci encore, dans une allocution diffusée vendredi dernier, il a remercié l’ambassadeur marocain à l’ONU pour son «soutien» et exprimé son souhait de pouvoir «ouvrir bientôt une représentation diplomatique kabyle au Maroc». Or, cette «géopolitique de la tension et du chantage» exercée par le makhzen est à double tranchant. Non seulement elle renforce le régime algérien sur le plan interne, mais il peut également, à son tour, organiser une offensive autour de la situation des Amazighs du Rif. C’est ce que craignaient effectivement certains diplomates marocains en 2015 ! Justement, en parlant de cette région berbère, le Hirak du Rif n’a pas été soutenu par le MAK-GPK. Dans l’entourage de ce mouvement séparatiste, l’argument mis en avant à l’époque, c’était plutôt qu’il soupçonnait l’Algérie d’être derrière la révolte populaire partie d’Al Hoceïma, en octobre 2016, l’une des accusations mises en avant évidemment par les services marocains pour justifier la répression.
Mais les détracteurs du MAK affirmèrent qu’il ne pouvait pas se permettre le luxe de «fâcher» le makhzen, son principal «allié diplomatique» et qui serait, selon plusieurs rumeurs persistantes, l’un de ses «principaux soutiens financiers», selon les documents fuités par le hacker Chris Coleman en 2014.