El Watan (Algeria)

La guerre se répand au-delà des frontières

● Le Tigré est en proie depuis neuf mois à un conflit qui a connu un tournant fin juin avec la reprise, par les forces rebelles opposées au gouverneme­nt fédéral, d’une grande partie du territoire de cette région du nord de l’Ethiopie.

- Amnay Idir

■ Le Tigré est en proie depuis neuf mois à un conflit qui a connu un tournant fin juin avec la reprise, par les forces rebelles opposées au gouverneme­nt fédéral, d’une grande partie du territoire de cette région du nord de l’Ethiopie.

Les rebelles du Tigré ont affirmé, hier, avoir mené des opérations visant des forces gouverneme­ntales dans la région d’Afar, rapporte l’AFP. Cette «action très limitée» a visé des miliciens venus de l’Oromia, qui ont pris position le long de la frontière entre l’Afar et le Tigré, selon le porte-parole des rebelles, Getachew Reda. «Nous avons mené ces opérations pour nous assurer que ces forces seront renvoyées en Oromia», a-t-il indiqué. Et d’ajouter : «Il s’agissait d’une action très limitée, destinée à disperser ces milices de paysans dont la plupart étaient contraints de participer à cette guerre inutile.» Le Tigré est en proie depuis neuf mois à un conflit qui a connu un tournant fin juin avec la reprise, par les forces rebelles opposées au gouverneme­nt fédéral, d’une grande partie du territoire de cette région du nord de l’Ethiopie. Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a envoyé l’armée fédérale au Tigré en novembre dernier pour destituer les autorités régionales, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Selon lui, cette opération répond à des attaques contre des camps de l’armée fédérale ordonnées par le TPLF, parti qui a dominé le pouvoir éthiopien pendant trois décennies. Il a proclamé la victoire fin novembre après la prise de la capitale régionale Mekele. Mais les combats ont continué. Le 28 juin, les forces rebelles pro-TPLF ont repris Mekele, puis une grande partie du Tigré les jours suivants. Le gouverneme­nt mobilise désormais des forces régionales, venues notamment de l’Oromia, pour combattre aux côtés de l’armée fédérale.

Le porte-parole du TPLF a confirmé dimanche que des unités rebelles sont également actives dans le nord de la région d’Amhara, où la semaine dernière des milliers de miliciens ont été déployés à la frontière avec le Tigré.

Dans un communiqué dimanche sur Twitter, le Premier ministre a qualifié le TPLF de «cancer pour l’Ethiopie».

La guerre du Tigré intervient alors que ce pays de la Corne de l’Afrique entretient des relations conflictue­lles. Ainsi, un différend territoria­l oppose l’Ethiopie et la Somalie depuis plus d’un demi siècle. Les deux pays se sont affrontés deux fois pour la zone de l’Ogaden, une région de l’Extrême Est éthiopien, que la Somalie a tenté sans succès d’envahir dans les années 1970. En 2006, l’Ethiopie envoie ses troupes en Somalie pour combattre les islamistes somaliens. Depuis, Addis-Abeba a maintenu des troupes, certaines d’entre elles sous mandat de l’Union africaine (UA), pour combattre les islamistes shebab. Le Soudan s’est aussi retrouvé impliqué dans le conflit au Tigré lorsque des dizaines de milliers d’habitants fuyant la guerre s’y sont réfugiés. Le Premier ministre soudanais, Abdallah Hamdok, président de l’Autorité intergouve­rnementale pour le développem­ent (IGAD), organisati­on régionale de la Corne de l’Afrique, a proposé au début du conflit une médiation, rejetée par Abiy Ahmed, dans un contexte de tensions croissante­s entre Addis-Abeba et Khartoum. En effet, les armées soudanaise et éthiopienn­e ont récemment remilitari­sé la région d’Al Fashaga, une fertile bande de terre revendiqué­e par les deux pays, attisant les craintes de voir un conflit surgir dans cette zone. Le Premier ministre éthiopien a affirmé que son pays n’a «pas besoin d’une guerre» avec le Soudan, Entre-temps, le Soudan s’est allié à l’Egypte pour s’opposer à la réalisatio­n du Grand barrage de la Renaissanc­e (GERD), une gigantesqu­e infrastruc­ture électrique construite par l’Ethiopie sur le Nil Bleu. Partie intégrante de l’Ethiopie avant son indépendan­ce en 1993, arrachée après plusieurs décennies de guerre avec le pouvoir central d’Addis-Abeba, l’Erythrée connaît une relation sanglante avec son voisin du Sud. En 1998, Addis-Abeba et Asmara se sont à nouveau affrontées dans une guerre qui a fait 80 000 morts, s’achevant après deux ans de combats par une impasse politique. Pendant près de 20 ans, des frictions opposent les deux pays. Mais en 2018, le Premier ministre éthiopien conclut la paix avec le président érythréen, Issaias Afeworki, ce qui lui vaut un prix Nobel de la paix l’année suivante. Fin 2020, après le lancement par ce dernier d’une opération militaire au Tigré pour en chasser les autorités régionales, les troupes érythréenn­es se joignent à l’armée éthiopienn­e dans cette région frontalièr­e. Elles sont soupçonnée­s de nombreuses atrocités.

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Les rebelles du Tigré ont affirmé hier avoir mené des opérations visant des forces gouverneme­ntales dans la région d’Afar

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