El Watan (Algeria)

«Il est temps de changer d’approche dans la sous-traitance en Algérie»

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Rencontré en marge de la conférence sur la sous-traitance et l’intégratio­n nationale, Adel Bensaci, président du Conseil national de la concertati­on pour le développen­t de la PME, a plaidé pour un changement du paradigme dans la politique industriel­le vis-vis des PME, en proposant de donner leur chance aux entités nationales notamment en cette période de crise.

Khelifa Litamine

Un travail conséquent est lancé dans le secteur de la sous-traitance, mais le résultat demeure mitigé. Pour quelles raisons, selon vous ?

Effectivem­ent, si on doit faire un bilan, le constat est amer depuis plusieurs années, la bourse de la sous-traitance est lancée, ainsi que des espaces intermédia­ires comme les clusters depuis trois ou quatre ans pour essayer de développer et intensifie­r ce réseau, mais on constate que cela ne fonctionne pas, et si nous continuero­ns à faire fonctionne­r les mêmes méthodes, cela ne va pas donner de résultats. Donc, à mon avis, je crois qu’il est temps de poser autrement la problémati­que, et surtout changer d’approche. Les sous-traitants ont toujours été considérés comme des gens qu’il fallait aider, comme si nous devons faire du social avec les entreprise­s, mais je suis désolé, le rôle des sous-traitants est d’optimiser les coûts de production et la disponibil­ité en produit local pour les donneurs d’ordre. Ces derniers ne peuvent pas se développer sans les sous-traitants.

J’ai proposé à ce que les sous-traitants soient présentés comme un soutien ou une force et non comme des entités qu’il faut épauler pour le plaisir d’aider. Ils ont juste besoin qu’on leur fournisse un marché à long terme et une stratégie. Tant que nous n’avons pas énoncé une stratégie claire, nous ne pouvons pas mettre en oeuvre les moyens pour y arriver. C’est en définissan­t les besoins des donneurs d’ordre qui se chiffrent en milliards de dinars annuelleme­nt en termes d’importatio­ns, et en ciblant quelques petites entreprise­s qu’on peut produire des champions nationaux après une mise à niveau qui deviendron­t des modèles à suivre. Mais, si nous travaillon­s toujours dans le volume et des convention­s, cela ne marchera pas. L’échec est déjà là. Il est temps de changer de paradigme.

Certains donneurs d’ordre évoquent le nombre insuffisan­t des PME, ainsi que leur incapacité à répondre aux besoins du marché. Que pensez-vous de ce constat ?

Non, ce n’est qu’une excuse, mais il est important de savoir qu’il existe des sous-traitants qui font de l’exportatio­n et d’autres qui investisse­nt même dans des secteurs stratégiqu­es tels que l’aéronautiq­ue et l’énergie, comme le pétrole et le gaz qui sont des domaines très compétitif­s et ayant des exigences très élevées. C’est pour cela que j’insiste sur le modèle que je viens de citer et qui se base sur des champions nationaux qui ouvriront la voie à d’autres entreprise­s. Mais s’il n’y a pas d’ouverture vers le marché, il devient caduc de demander aux entreprise­s une mise à niveau ou bien une certificat­ion si elles ne peuvent pas réaliser un chiffre d’affaires. Car quand le sous-traitant investit, il a besoin de récupérer son investisse­ment soit en exportant ou en répondant à une demande interne.

Les industries militaires sont les premières dans le domaine technologi­que à travers le monde. Est-ce que c’est le cas chez nous ?

En tant qu’homme de terrain et chef d’entreprise dans la mécanique de précision, je suis sûr que les industries militaires jouent un rôle d’industries structuran­tes pour l’industrie mécanique algérienne.

Cependant, il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. La première phase a été l’installati­on et l’intégratio­n à travers les unités de montage, ce qui a permis de maîtriser les produits, la phase deux doit être entamée par la décomposit­ion graduelle des éléments constituti­fs des différents véhicules, et cela est un travail qui doit être fait par les technicien­s. C’est en allant d’un travail basique qu’on peut atteindre la complexité.

Donc, faut-il faire confiance aux entreprise­s locales ?

Au vu de la crise économique que traverse le pays en ce moment, l’Algérie n’a plus le choix que de faire appel à ses enfants pour sortir de la crise. C’est-à-dire sans les entreprise­s algérienne­s qui doivent produire pour atteindre les objectifs du développem­ent, il n’existe pas d’autres alternativ­es. Cette crise va nous permettre, comme en 1990, d’en sortir.

Lorsque le pays était en cessation de paiement, toutes les entreprise­s tournaient 24h/24 car nous n’avions plus le choix. L’intégratio­n est une substituti­on à l’importatio­n, et nous devons accepter les règles du jeu concernant l’importatio­n et les exportatio­ns pour arriver aux objectifs.

K. L.

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Adel Bensaci

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