Qu’en sera-t-il demain ?
● Que va-t-il se passer vendredi prochain ou dans les semaines à venir ? La question se pose avec acuité, d’autant que les manifestants, ceux qui sont restés dans la rue, jugent que le pouvoir en place n’a pas répondu favorablement à leurs revendications politiques.
La 118e marche du hirak n’a pas pu avoir lieu à Alger. C’est le deuxième vendredi de suite que les manifestations hebdomadaires sont empêchées un peu partout à travers le territoire national, à l’exception de la Kabylie. Un dispositif de sécurité impressionnant a été déployé à cet effet. Et les manifestants ont évité, comme c’est le cas maintenant depuis plus de deux ans, la confrontation avec les policiers. Des centaines de personnes ont été arrêtées ce vendredi, comme il en a été de même une semaine auparavant. Que va-t-il se passer vendredi prochain ou dans les semaines à venir ? La question se pose avec acuité, d’autant que les manifestants, ceux qui sont restés dans la rue, jugent que le pouvoir en place n’a pas répondu favorablement à leurs revendications politiques. Estce la fin du hirak ? Certains diront oui. Ceux-là se comptent principalement, mais pas que, parmi ceux qui depuis un moment déjà sont critiques vis-à-vis de ce mouvement populaire, né en février 2019, tous d’abord pour faire barrage au 5e mandat de l’ancien président, Abdelaziz Bouteflika. D’autres, par contre, pensent à un «repli tactique et obligé», le souci de s’en tenir à l’aspect pacifique de la contestation étant prépondérant. La situation paraît complexe. Des élections législatives, contestées par les manifestants, devront avoir lieu le 12 juin prochain. Au vu des participants, et surtout du fait que le processus politique en cours est marqué par la répression et une fermeture sans pareille des champs politique et médiatique, rien n’indique que ce rendez-vous puisse régler une crise politique profonde. En d’autres termes, pour ceux qui sont dans la rue, les raisons les ayant poussés à manifester, depuis un certain 22 février 2019, sont toujours là. Néanmoins, aujourd’hui, c’est une tout autre configuration qui se présente. Avec le dispositif sécuritaire déployé, il est clair que manifester le vendredi (pour le mardi, les étudiants n’ont même pas essayé cette semaine) devient de plus en plus difficile. Certains voudront certainement tenter le coup encore une fois vendredi prochain. Même en prenant le risque de se faire arrêter, au minimum pendant plusieurs heures dans un commissariat, ou au pire placer en garde à vue et éventuellement sous mandat de dépôt. Des activistes tentent de débattre sur d’autres formes de contestation pour faire durer le hirak. Mais jusque-là, rien n’a encore pris forme. «Le hirak est une idée et une idée ne meurt pas», ont écrit plusieurs militants, comme pour dire que même si les marches n’ont plus lieu, l’esprit de ce mouvement restera toujours là. Dans tous les cas de figure, personne ne peut prédire comment les choses vont évoluer. D’autant plus qu’il y a eu des épisodes par le passé où beaucoup avaient misé sur sa fin et il n’en fut rien. Son retour, au mois de février dernier, à l’occasion de son deuxième anniversaire, après un arrêt de près de huit mois pour cause de Covid-19 n’était pas attendu. Du moins pas avec cette ampleur qui, certes, n’est pas comparable avec les manifestations des premiers mois de 2019, mais qui est quand même importante, si l’on prend en considération certains paramètres (suspension des marches, arrestations, polémiques, clivages idéologiques…). Bien entendu, les choses ne se présentent plus de la même manière aujourd’hui, avec la ferme intention des autorités de ne pas laisser ces manifestations être organisées. Le hirak, qui a poussé l’ancien Président à renoncer à son 5e mandat et a amené le pouvoir à mettre en prison plusieurs responsables, aussi bien civils que militaires, et à aller vers des élections législatives anticipées, est maintenant à la croisée des chemins. Pourra-t-il continuer à faire entendre sa voix, même sous une autre forme ? Les semaines à venir nous le diront.