«Une occasion de mettre en évidence l’Académie algérienne des sciences et technologies et ses membres»
Dans cet entretien, le Dr Azzedine Bousseksou revient sur la distinction décernée aux quatre membres de l’Académie algérienne des sciences et technologies par la prestigieuse université américaine Stanford Leland, une des meilleures universités de la Silicone Valley.
L’université américaine de Stanford Leland vient de vous classer, ainsi que trois de vos collègues de l’Académie algérienne des sciences et technologies, parmi les 2% meilleurs scientifiques au monde. Comment avez-vous accueilli cette honorable distinction ?
Bien sûr, c’est toujours très motivant de recevoir de telles distinctions au niveau international. J’appelle de tous mes voeux que ce soit une occasion de mettre en évidence l’Académie algérienne des sciences et technologies (AAST) et ses membres, qui cherche les voies et moyens lui permettant de s’émanciper en Algérie et d’avoir la position prestigieuse dont jouissent toutes les académies des pays étrangers. C’est aussi l’occasion de saluer le courage des scientifiques algériens, qui arrivent à se distinguer et avoir une visibilité à l’international. L’autre mérite est que les carrières scientifiques de ma consoeur Houria Triki et mes deux confrères Adel Belouchrani et Oualid Hamdaoui sont réalisées en Algérie. Cette distinction au niveau mondial peut constituer une belle émulation et motivation pour nos jeunes chercheurs évoluant en Algérie.
En quoi consiste exactement ce classement et sur quelle base a-t-il été fait ?
C’est un classement des 2% des scientifiques les plus performants au monde (The 2%Top Scientists). Ce classement a été réalisé par une équipe de chercheurs de l’université de Stanford (Etats-Unis). Il est établi au regard de l’analyse du nombre de publications scientifiques réalisées et de citations scientifiques émises par les pairs pendant la carrière de chaque chercheur, selon les données fournies par Scopus. Scopus est une base de données transdisciplinaires de résumés et de citations de publications scientifiques. Le classement retenu compte 159 684 scientifiques représentant 2% de l’ensemble des scientifiques de la planète, répartis en 22 domaines scientifiques et 176 sous-catégories.
Vous avez été primé en 2003 pour le prix SCF (Société chimique de France, division chimie de coordination) et vous avez été lauréat du prix Langevin chimie 2009 de l’Académie des sciences en France, de la médaille d’argent du CNRS en 2010 et du Grand Prix Süe de la SCF en 2020 France et récemment vous avez obtenu la bourse ERC senior 2021 pour vos découvertes. Peut-on avoir un aperçu sur vos principaux travaux ?
Mon activité scientifique avec mon groupe de recherche sur la bistabilité moléculaire est aujourd’hui mondialement reconnue, se situant dans le domaine de la transition de spin moléculaire et des matériaux moléculaires commutables (adressables). Notre activité a marqué ce domaine de recherche en particulier en le faisant volontairement évoluer de l’étude des propriétés de bistabilité au niveau fondamental vers leur mise en forme et leur intégration dans des dispositifs pour la nanophotonique, la nanoélectronique et la nanomécanique avec des objets moléculaires. Mon équipe de recherche et moi-même sommes spécialisés dans ce domaine, la transition de spin moléculaire. Nous avons développé trois approches conceptuelles, aujourd’hui bien établies sur le plan international et qui représentent les fils conducteurs de l’évolution de ce domaine au niveau mondial : le transport nanoélectronique (spintronique moléculaire), avec la mise en place des tout premiers dispositifs moléculaires permettant de coupler un état de spin avec le transport électronique dans une jonction nanométrique ; l’optique bistable, menant à des dispositifs photoniques très performants avec la mise en place de capteurs pour la nanothermométrie (brevetés) dépassant les dispositifs commerciaux actuels. La commutation réversible du volume moléculaire, avec la réalisation des premiers nanoactuateurs à sens contrôlé, dont la combinaison chimique avec des polymères a permis la mise en place de matériaux actifs prototypes de «muscles artificiels» avec des applications avancées à court terme en robotique et en micro-nanomécanique et à plus long terme pour la médecine et l’assistance mécanique du muscle humain… (projet ERC 2020) qui vient d’être sélectionné en niveau européen. Il s’agit là d’un soutien hautement prestigieux de la commission européenne.