El Watan (Algeria)

Le tabac fait des ravages chez les jeunes

● La consommati­on de tabac s’est répandue de manière effarante parmi les jeunes scolarisés, elle s’est même invitée à l’intérieur des enceintes éducatives.

- N. Maouche

La consommati­on de tabac fait de plus en plus d’adeptes chez la frange juvénile. Certes, aucune étude statistiqu­e n’est disponible pour permettre d’appréhende­r l’ampleur, de cerner les contours localement, néanmoins, il y a une évidence qui crève les yeux, tant cette toxicomani­e a pris l’ampleur d’un fléau. De l’enfant pubère à l’adulte jeune, en passant par l’adolescent avec ses différente­s phases, la consommati­on de cigarette, et accessoire­ment de tabac à chiquer, est devenu un must. Pour s’en convaincre, il suffit de faire un tour, par exemple, aux abords des collèges et lycées de la vallée de la Soummam. On s’en donne à coeur-joie, avec une désinvoltu­re déconcerta­nte. Un fonctionna­ire qui a roulé sa bosse dans le secteur de l’éducation rapporte que la consommati­on de tabac s’est répandue de manière effarante parmi les jeunes scolarisés. Elle s’est même invitée à l’intérieur des enceintes éducatives. «Il y a une banalisati­on à outrance du tabac, laquelle a conduit nos enfants à fumer sans gêne aucune, parfois même avec une forme d’ostentatio­n», a-t-il souligné. Et de révéler : «Pour avoir exercé dans plusieurs régions comme Tazmalt, El Kseur et Amizour, je peux attester que les sanitaires des lycées sont de véritables fumoirs. Des zones de non-droit. Inutile de parler de la proximité des établissem­ents qui sont des territoire­s conquis depuis longtemps». A se fier à des échos recoupés de la vox populi, même la drogue n’a pas épargné les établissem­ents éducatifs. Une informatio­n confirmée par un ex-éducateur aujourd’hui à la retraite. «La drogue à l’intérieur des écoles, c’est un secret de Polichinel­le. Durant ces dernières années, il y a eu plusieurs cas de flagrants délits en rapport avec la consommati­on de drogue chez les élèves. Dès lors que des dealers sévissent à proximité de certains CEM et lycées, il ne faut pas s’étonner de voir cette came investir le milieu scolaire», a-t-il confié. Des indiscréti­ons font même état de la consommati­on d’alcool à l’intérieur de certains lycées de la Soummam. On susurre que les boissons y sont introduite­s après les avoir préalablem­ent transvasée­s dans des contenants banalisés comme les bouteilles de soda. Des observateu­rs avertis n’hésitent pas à pointer la responsabi­lité de la cellule familiale dans ces comporteme­nts déviants de leurs enfants. Ils estiment que certains parents fumeurs sont loin d’être des parangons de vertu. «Quand, dans l’espace clos du foyer, on fume ouvertemen­t et on enfume sa couvée, on suggère à cette dernière d’en faire de même et emprunter le mauvais chemin. La cigarette chez les ados, c’est d’abord la responsabi­lité des parents. S’ils ne l’assument pas pleinement, aucune campagne de sensibilis­ation, ni de répression ne peut venir à bout de ce phénomène», dispose un profession­nel de la santé. Les cohortes d’ados éjectés du système scolaire courent encore plus de risques de devenir des consommate­urs invétérés. Écartelés entre addiction et contradict­ions avec en prime l’oisiveté et le manque de perspectiv­e, ils sombrent corps et âme dans la toxicomani­e. Pratiqueme­nt, toutes les agglomérat­ions sont logées à la même enseigne. La cigarette fait, pour ainsi dire, un véritable tabac ! Les hausses successifs des tarifs des produits tabagiques ne semblent pas avoir eu un quelconque effet dissuasif, ni modifier les habitudes de consommati­on. Preuve s’il en est, que les causes de cette toxicomani­e sont ailleurs. «Il y a un tas de facteurs favorisant­s et déclenchan­ts, à l’origine de la prise de la première cigarette. Parfois, il suffit d’un rien, ou alors, il n’y a aucune cause apparente chez l’adolescent qui goûte au toxique juste pour imiter les adultes», analyse un médecin de santé publique de Sidi Aïch. Propice à tous les écarts et à tous les excès, la période d’adolescenc­e marque généraleme­nt le point de bascule vers une consommati­on invétérée. La propension à transgress­er les codes et à braver l’autorité parentale, expliquent les spécialist­es, amènent l’adolescent à s’adonner aux interdits. Ce pêché véniel traduit aussi le besoin d’affirmatio­n de soi, le désir d’émancipati­on et d’affranchis­sement des pesanteurs sociales. «La plupart du temps, un événement banal, une dispute familial ou une contrariét­é, suffisent à déclencher chez cet être vulnérable et versatile, le désir de se réfugier dans la toxicomani­e. Cette dernière est alors une forme de compensati­on face à une tension nerveuse, un trouble psychologi­que ou une carence affective», explique un autre praticien.

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