FAUT-IL LEVER LES SUBVENTIONS ?
CONSOMMATION ET GASPILLAGE DU PAIN
Les pouvoirs publics n’ont jamais autant communiqué sur le gaspillage du pain que durant ces dernières semaines. Rencontres, déclarations et campagnes se sont succédé alors que ce phénomène n’est pas vraiment nouveau.
Les pouvoirs publics n’ont jamais autant communiqué sur le gaspillage du pain que durant ces dernières semaines. Rencontres, déclarations et campagnes se sont succédé alors que ce phénomène n’est pas vraiment nouveau. Selon certains observateurs, cette offensive gouvernementale laisse croire qu’il y aura très probablement une remise en question des subventions. Simple hypothèse ou signes avant-coureurs d’une prise de décision à court terme? Les avis ne sont pas tranchés en faveur de l’une ou l’autre de ces options. Les Algériens ont été habitués à des prix bas pour un certain nombre de biens. Une augmentation brutale de ces prix pourrait être mal perçue par la population. Il ne s’agit donc pas de mettre fin purement et simplement aux subventions.
Le gaspillage du pain s’est accentué, notamment par son prix bas qui encourage à sa consommation, et sa qualité médiocre, qui ne permet pas une longue conservation, le manque d’habitude de consommation dans le recyclage du pain et circuits de distributions mal organisés (boulangeries, épiceries...). Contacté par El Watan, Omar Ameur du syndicat affilié à l’Union nationale des commerçants et artisans algériens (UNCA), déclare que le citoyen algérien consomme un pain d’une valeur nutritionnelle «médiocre», compte tenu des additifs alimentaires introduits dans sa fabrication, notamment l’améliorant et de la farine qui n’est pas saine pour le système digestif. Pour lui, les chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur sont juste des indicateurs d’une tendance, mais qui méritent d’être plus affinés et plus détaillés. «Selon nos observations sur le terrain, le gaspillage du pain a nettement reculé pendant ce Ramadhan, atteignant, selon nos estimations, entre 45 et 50%, alors qu’il était les années précédentes à 95%. Les chiffres du ministère se réfèrent au nombre de pains invendus chez les boulangers et la collecte des ordures ménagères. Or, le pain invendu n’est pas considéré comme un gaspillage, puisqu’il est généralement destiné à l’alimentation du bétail.» Selon ses analyses, il y a plusieurs causes au recul du gaspillage : «L’Algérien est de plus en plus sensibilisé à travers les campagnes lancées. Il y a aussi la chute de son pouvoir d’achat qui lui impose de rationaliser ses dépenses. On a remarqué pendant ce Ramadhan que le citoyen, quand il entre dans une boulangerie, téléphone à sa famille pour lui demander le nombre de pains à acheter. On n’est plus dans l’achat impulsif ou dans la démarche des tentations d’achat répétées.» Lors d’une journée d’étude sur la rationalisation de la consommation, organisée par le Conseil national économique, social et environnemental (Cnese) en avril dernier, Rédha Tir, président du conseil a déclaré : «Personne ne tire profit de ce phénomène (gaspillage) qui induit parfois une instabilité du marché suite à la croissance injustifiée de la demande sur certains produits de large consommation, notamment avec l’avènement du mois de Ramadhan.» Parmi les produits connaissant un gaspillage ou un excès de consommation, l’intervenant cite le pain, l’eau potable, la consommation de l’électricité et de l’essence et autres produits qui coûtent au Trésor public «des milliards de dollars annuellement» et qui peuvent être transférés vers d’autres secteurs stratégiques, tels que la santé, l’éducation et l’enseignement, en sus d’orienter les quantités de certains produits en excès vers l’exportation à l’effet d’améliorer les recettes de l’Etat en devises. La question de la rationalisation de la consommation doit être placée au coeur des préoccupations pour réduire la facture d’importation des produits de consommation et assurer le coût de la subvention accordée annuellement aux produits de large consommation.