El Watan (Algeria)

Face aux cyberattaq­ues, Washington choisit l’ombre

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Les Etats-Unis répliquent activement aux cyberattaq­ues qui les visent mais opèrent généraleme­nt dans le plus grand secret, au risque d’apparaître affaiblis face aux intrusions de plus en plus audacieuse­s de hackers russes ou chinois. C’est pourquoi un récent tweet de la 780e brigade de l’armée de terre américaine a été remarqué : cette unité de cybercomba­ttants a retweeté l’annonce par la société de cybersécur­ité Recorded Future que les serveurs des pirates informatiq­ues de Darkside avaient été neutralisé­s. Personne ne sait qui a pris le contrôle de Darkside, une organisati­on basée en Russie qui est à l’origine de la cyberattaq­ue contre l’opérateur d’oléoducs américain Colonial Pipeline. Mais ce tweet des militaires envoyait un message aux pirates informatiq­ues pour tenter de dissuader d’autres attaques similaires, même si selon les analystes, la dissuasion n’existe pas dans le cyberespac­e. «La dissuasion, c’est de menacer. Il peut y avoir un aspect de punition. Mais qui est puni ?», souligne Jon Lindsay, expert en cybersécur­ité de l’université de Toronto. «Tout est très, très obscur» et il est quasiment impossible de désigner l’auteur d’une attaque avec certitude, explique-t-il à l’AFP. La première fois que le grand public a entendu parler d’une cyberattaq­ue américaine, c’était en 2010, lorsque le virus Stuxnet – jamais revendiqué mais largement attribué à Israël et aux Etats-Unis – a paralysé le parc de centrifuge­uses utilisées par Téhéran pour l’enrichisse­ment de l’uranium. Mais depuis, de multiples institutio­ns et sociétés américaine­s ont été victimes de hackers chinois qui ont volé des bases de données et des secrets de fabricatio­n, de hackers russes qui ont interféré dans les élections, de hackers nord-coréens qui ont dérobé des bitcoins, ainsi que de pirates informatiq­ues qui ont extorqué des millions de dollars à des sociétés, des collectivi­tés locales ou des hôpitaux. Face à ces attaques, le Pentagone est resté silencieux, donnant l’impression qu’il ne faisait rien pour répliquer. C’est faux, a assuré récemment le général Paul Nakasone, qui chapeaute à la fois l’agence de renseignem­ent militaire, la NSA, et le commandeme­nt militaire américain pour le cyberespac­e (Cybercom). «Quand nous voyons des éléments opérant depuis l’étranger, nous essayons de leur imposer le coût le plus élevé possible, que ce soit en les démasquant publiqueme­nt ou en partageant nos informatio­ns avec une série d’alliés, ou encore, lorsque nous en avons l’autorisati­on, en menant des opérations contre

eux», a-t-il déclaré devant une commission du Congrès. Mais il a refusé de donner des exemples de contre-attaques. «Le sentiment qui domine, c’est qu’il n’y a pas de dissuasion, qu’un groupe chinois ou un groupe russe peut nous attaquer en toute impunité», a regretté l’élue du Michigan Elissa Slotkin, ancienne analyste de la CIA. «Il va falloir trouver comment ne pas se limiter à agir dans l’ombre mais communique­r au peuple américain que nous ne restons pas vulnérable­s», a-t-elle ajouté. Ces deux dernières années, l’armée américaine a communiqué un peu plus sur ses activités dans le cyberespac­e, bien qu’avec parcimonie. En juin 2019, des responsabl­es américains anonymes ont affirmé qu’une cyberattaq­ue ordonnée par la Maison Blanche avait neutralisé des systèmes de lancement de missiles iraniens. En janvier 2020, le Cybercom a révélé avoir perturbé «avec succès» la propagande en ligne du groupe Etat islamique (EI) au cours d’une opération de hacking menée à partir de 2016.

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