Un pionnier de la presse privée et indépendante
L’un des doyens de la presse écrite, l’un des derniers «Mohicans» de celle dite privée et indépendante, Zoubir Souissi, membre fondateur du quotidien Le Soir d’Algérie, est décédé hier à Alicante (Espagne). Il avait 78 ans. Après avoir collaboré au bureau d’Alger républicain de Constantine, Zoubir Souissi entame sa carrière au quotidien An Nasr. A la fin de l’année 1970, après l’arabisation du quotidien régional, il rejoindra le journal national El Moudjahid, où il occupera les fonctions de chef de la rubrique nationale puis celle de rédacteur en chef adjoint. En janvier 1978, il quitte El Moudjahid pour Révolution africaine, dont il devient le rédacteur en chef en 1985. Il quitte l’hebdo du FLN pour l’APS deux années plus tard. Après Octobre 1988, il participe au grand débat sur le devenir de la presse, sous l’égide du MJS. En 1990, à la faveur de la circulaire Hamrouche (du nom du chef de gouvernement de l’époque), il se lancera, en compagnie de quatre de ses amis, Mohamed Bederina, Fouad Boughanem, Maâmar Farah et Djamel Saïfi, dans ce qui fut appelé alors l’aventure intellectuelle. Ensemble, ils créent le premier quotidien indépendant, Le Soir d’Algérie, dont il assure la direction pendant une dizaine d’années.
Nous sollicitions souvent Zoubir Souissi quand il était le président du Conseil supérieur de l’éthique et de la déontologie (CSED). C’était un professionnel, affable, humain et d’une immense culture.
Quand il publia son premier livre La tête des orphelins, paru aux éditions Casbah, il était enthousiaste à l’idée de s’essayer à l’exercice littéraire. Il nous avait alors confié : «J’ai déjà écrit une pièce de théâtre il y a plus de 30 ans. Je pense que je vais continuer à écrire. Ça y est, j’y ai pris goût… C’est beaucoup plus des témoignages que j’apporte sur l’Algérie. Je raconte nos espérances, nos déceptions, bien sûr. Et comme tout bon Algérien aimant son pays, je suis consterné. J’aurais voulu que notre pays réussisse mieux que ce qu’il est maintenant. Hélas ! D’où le titre que j’ai choisi pour mon livre. J’ai choisi le titre à partir de l’aphorisme arabe (‘‘Ils apprennent la coiffure sur la tête des orphelins’’). Nous avons été pris en charge par des gens qui ont appris la coiffure sur la tête des orphelins. On fait l’autogestion puis la Révolution agraire, ensuite c’est l’économie de marché. Et 45 ans après, nous n’avons pas encore trouvé la voie. L’Algérie aurait pu être un pays locomotive de l’Afrique. Nous avons des moyens humains, un potentiel économique, l’un des meilleurs du continent. Et avec cela, nous sommes parmi les pays les moins développés d’Afrique, un taux de chômage inacceptable…»