El Watan (Algeria)

IRIS désigné champion de 2020

Le trophée de la meilleure entreprise algérienne exportatri­ce hors hydrocarbu­res pour l’année 2020 a été décerné à l’Eurl Saterex, connue sous le nom commercial d’IRIS, spécialisé­e dans l’électroniq­ue, l’électromén­ager, la téléphonie mobile et les pneumat

- Entretien réalisé par Nabila Amir N. A.

Le ministre de l’Intérieur a engagé une action en justice pour la dissolutio­n de l’associatio­n RAJ, dont vous êtes le président. Que vous reproche le départemen­t de Beldjoud ?

Selon la requête déposée auprès du tribunal administra­tif, le ministère de l’Intérieur nous reproche d’avoir mené des activités qui sont en violation avec la loi 12-06 relative aux associatio­ns, et qui sont incompatib­les avec les objectifs énoncés dans les statuts de notre associatio­n. Les activités énumérées dans la requête remontent à la période du hirak, à savoir les forums organisés par le RAJ et ses positions et initiative­s en faveur du mouvement populaire. Nous précisons que nos activités étaient et sont toujours connues et suivies par un large public. Nous avons toujours travaillé dans la transparen­ce et nos manifestat­ions sont retransmis­es en direct par photos et vidéo. Le RAJ, dont l’engagement en faveur de la citoyennet­é, de la liberté et de la démocratie en Algérie ne date pas de février 2019, s’est impliqué dans le hirak, nous avons même rendu public un communiqué où l’on a annoncé le gel de toutes nos activités ordinaires pour se consacrer au mouvement populaire, car nous avons vu que ce dernier est une opportunit­é à ne pas rater pour concrétise­r le changement démocratiq­ue et pacifique du régime. Le RAJ a fait son choix d’être avec et aux côtés des Algériens qui luttent et qui aspirent à la liberté, à la démocratie et au vivre-ensemble dans la tolérance et le respect de la diversité, de la pluralité et de la différence. Je tiens à vous rappeler que durant le hirak, les forums publics du RAJ au niveau de la Grande-Poste étaient empêchés, l’université d’été du RAJ prévue en septembre 2019 a été interdite, l’université populaire empêchée et réprimée, ajoutons à cela que 11 membres du RAJ sont poursuivis en justice, dont neuf ont fait de la prison pour des chefs d’inculpatio­n fallacieux. Cela n’a pas suffi au pouvoir, il a engagé une procédure pour dissoudre notre associatio­n. Donc, il s’agit clairement d’un acharnemen­t sans précédent contre notre associatio­n et, à travers le RAJ, toutes les dynamiques organisées et autonomes et contre toutes les voix discordant­es. Le pouvoir n’a, malheureus­ement, pas tendu la main au hirak, ce mouvement inédit en Algérie et dans le monde, et qui a suscité l’admiration et le respect par son civisme, son endurance, ses revendicat­ions politiques et son caractère national et pacifique. Au contraire, il a considéré le hirak comme un adversaire à abattre. Dans un Etat de droit, le RAJ et d’autres dynamiques autonomes mériteraie­nt d’être salués et remerciés pour leur engagement et le travail qu’ils ont mené et qu’ils mènent sur le terrain en faveur de l’Algérie. Avec nos avocats, nous allons mener une bataille judiciaire pour que notre associatio­n continue d’exister, car l’Algérie a besoin de centaines, voire de milliers d’associatio­ns engagées sur le terrain, comme le RAJ, dans tous les domaines et à tous les niveaux.

Deux partis politiques, en l’occurrence l’UCP et le PST, sont également menacés de dissolutio­n. Est-ce une remise en cause du multiparti­sme ?

En ce moment, le pouvoir joue sur la montre et l’usure, il cherche à gagner du temps en procédant à la diversion. Il crée de nouveaux problèmes pour détourner la société et l’opinion publique de l’objectif initial du mouvement populaire, pour lequel des millions d’Algériens sont sortis depuis février 2019. Le harcèlemen­t judiciaire mené contre les partis politiques de l’opposition, comme l’UCP, le PST, le RCD et le PT, est une manière de criminalis­er le multiparti­sme, l’un des acquis démocratiq­ues de la révolte d’Octobre 1988. Cette approche sécuritair­e et le tout-répressif de ces dernières semaines ne peuvent qu’aggraver la crise déjà profonde, la prolonger dans le temps et maintenir la rupture au sein de la société. On ne peut pas construire une démocratie sans une opposition forte, sans un contre-pouvoir réel représenté par une société civile organisée et autonome, sans l’indépendan­ce de la justice et sans garantir les libertés de la presse, d’expression et de rassemblem­ent. Le pouvoir est interpellé pour cesser son entêtement et sa fuite en avant, mettre un terme au replâtrage politique en amorçant un véritable processus de changement démocratiq­ue et pacifique du régime.

Vous avez été auditionné par la Police judiciaire (PJ) du commissari­at central de Béjaïa. Pourquoi ?

Le jour où nous avons reçu la requête du ministère de l’Intérieur, j’ai reçu une convocatio­n pour me présenter au service de la police judiciaire du commissari­at central de Béjaïa. Je m’y suis rendu le dimanche, j’ai trouvé un questionna­ire portant sur mes déplacemen­ts à l’étranger, notamment dans la région maghrébine, et sur une personne «amie» avec moi sur Facebook, mais que je ne connais même pas. Concernant mes déplacemen­ts, je les ai assumés, ils s’inscrivent dans le cadre des activités auxquelles RAJ est invité par nos partenaire­s pour prendre part aux questions liées à la constructi­on du Maghreb du peuple et démocratiq­ue et au phénomène migratoire dans la région. On m’a assuré que ma convocatio­n n’a rien à voir avec la requête déposée par le ministère de l’Intérieur, mais personnell­ement, je la considère comme une autre forme d’intimidati­on qui vise à dissuader et faire peur aux militants et activistes du hirak.

Les marches pacifiques des mardis et vendredis sont empêchées et plusieurs arrestatio­ns sont signalées. Que cherche-t-on, selon vous, à travers cette nouvelle stratégie ?

Le pouvoir cherche, malheureus­ement, à en finir avec le hirak et il a choisi, après plusieurs stratagème­s, la voie de la répression. Le climat est très tendu à la veille d’une élection que le pouvoir présente comme décisive ! Cette approche répressive et l’agenda électoral imposé ont montré leurs limites, le pouvoir doit faire son bilan, il a beaucoup réprimé, il a poursuivi des milliers de personnes en justice, en a emprisonné des centaines, il a interdit les marches, les conférence­s et les rassemblem­ents, il a fermé le champ politique et l’espace public, il a verrouillé le champ médiatique, il a imposé des élections… Mais cela n’a pas arrêté la contestati­on populaire. L’arrêt ou l’empêchemen­t des marches ne veut pas dire la fin du hirak, qui peut réinventer à tout moment de nouvelles formes de lutte dans le moyen et long termes. La solution est ailleurs, le seul remède est la démocratie, et ce, en permettant aux Algériens de s’organiser librement et d’exercer leurs liberté et citoyennet­é afin de contribuer à la constructi­on de l’Algérie de demain, celle des libertés et des institutio­ns crédibles et légitimes.

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Abdelouaha­b Fersaoui

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