Quand la marge se mue en centralité
Avec un taux de participation affichant les 32,15% samedi à la fermeture des bureaux de vote et amputée de la moitié de ses sièges représentatifs à l’APN à la faveur de la nouvelle wilaya de Touggourt, avec qui elle a partagé équitablement ses six sièges, Ouargla a fait des législatives du 12 juin une occasion pour opérer une rupture symbolique avec le FLN et le RND, malgré la sélection de nouvelles têtes, jeunes, féminines aux grades universitaires très élevés. Mais aussi un choix prononcé pour les candidates venant de la marge. Seul bémol, aucune femme parmi le peloton gagnant en l’absence de quota et retour à la représentation exclusivement masculine de la société locale au sein du Parlement
El Bina, MSP et le Front El Moustakbal. Tels sont les trois lauréats qui ressortent des résultats préliminaires du scrutin du 12 juin pour la wilaya de Ouargla. Des résultats attendus et donc c’est sans surprise que Rizig Atallah, élu à l’APC de Ouargla pour le mouvement El Bina, le Dr Boubakeur Benalia, élu MSP à l’APW de Ouargla, et le Dr Abderahmane Salhi pour El Moustakbal briguent un mandat à l’APN après avoir des activistes sociaux au sein du mouvement associatif, notamment pour le cas de Salhi qui vient de se distinguer à plusieurs égards.
Ce succès, qu’il doit d’abord à son engagement sans faille durant de longues années au sein du mouvement associatif et sa participation active à toutes les campagnes de sensibilisation et de nettoyage au sein de sa communauté ksourienne, qui a soutenu sa candidature au détriment de la liste libre d’El Wihda, constituée de personnalistés ksouriennes aussi actives ayant déjà fait partie des instances élues ou administratives locales. Soutenu par la jeune génération, qui a vu en ce jeune docteur en sciences de la communication de l’université de Ouargla un exemple à suivre et peut-être l’espoir d’un porte-voix, Salhi qui, bien qu’originaire de Djemaa, a su éluder la question des origines tribales en faisant valoir les liens du coeur et de l’engagement au sein du ksar qu’il ne quitte presque jamais, prouvant ainsi aux voix faisant passer les liens tribaux avant tout dans cette ville où l’appartenance de sang est très forte, qu’une autre voie est possible.
La procession de jeunes activistes de la société civile, qui l’a accompagné en dansant la traditionnelle Takouka dimanche soir à travers la ville, a voulu marquer cet événement, signifiant peut-être que le pouvoir de porter une candidature n’est plus entre les mains des instances informelles des sages du ksar mais bien au sein des jeunes constituant la coordination des associations du Ksar de Ouargla, qui ont bravé les consignes et scindé en deux les listes représentatives du coeur citadin de Ouargla, comptant une assise électorale de quelque 14 000 électeurs sur les 208 193 inscrits à travers la wilaya.
Pour les autres lauréats de ces législatives empreinte d’un taux d’abstention qui a dépassé les 67%, venir de la périphérie du chef-lieu de la wilaya pourrait signifier une réussite de la population de la marge à s’imposer, ramenant ces zones de l’ombre dans le vif du sujet, du moins symboliquement pour ces nouveaux personnages qui ont fait campagne dans la banlieue pauvre et oubliée bien avant le lancement des législatives. Une sorte de revanche du petit inécouté sur les candidats ancrés dans les centres et au coeur de l’économie locale, qui se sont certes dispersés à travers 34 listes (20 partisanes et 14 indépendantes).
Houria Alioua