Construire un pays sans peuple comme faire une omelette sans oeuf
Sous Bouteflika, 4 élections législatives ont été organisées avec des résultats déclarés officiellement le lendemain à midi et avec calcul des quotas. Pour la première après lui, il aura fallu trois jours pour dépouiller les maigres participations, à cause, selon les experts en calcul différentiel, de la complexité du nouveau système électoral, ce qui a donné ce suspense inédit, qui au fond n’en est pas vraiment un ; est-ce le FLN qui a encore gagné, les partis islamistes qui vont détenir la majorité ou les indépendants, vrais ou faux, qui seront le nouveau paramètre législatif ? En réalité, on pourrait dire exactement le contraire de ce qu’a dit le Président : «Le taux de participation ne
m’intéresse pas», en rappelant que les noms et prénoms des vainqueurs ne sont pas l’information la plus capitale, mais le taux de participation qui l’est, donnant avec précision le degré d’adhésion de la société à la démarche. 60% d’abstention à la présidentielle, 70% pour la Constitution et 70% pour ces législatives. Selon les estimations, les trois quarts du pays ne croient pas aux élections, et à moins de continuer à vouloir gouverner sans base et à administrer sans soutien, les autorités devraient réfléchir à leur ligne monomaniaque, construire un pays sans sa population. Le hirak sort-il vainqueur ? Pas forcément, même s’il n’a pas vocation à prendre le pouvoir, il a vu le système se régénérer sous ses yeux, avec plus de violence, mais même si le FLN, le RND, le MSP sortent encore vainqueurs par défaut, c’est quand même une manière de dire que sans le hirak, la vie continue, mais que sans lui, elle sera plus dure. D’ailleurs, cette élection fut assez particulière, s’il fut un temps où on payait les électeurs pour voter, ce sont les candidats qui ont été payés cette fois-ci, 300 000 DA d’aide pour participer. On peut déjà imaginer qu’au prochain scrutin, il y aura plus de candidats que de votants. Gain de temps, on pourra ainsi directement installer les votants en tant que députés.