El Watan (Algeria)

Une si lointaine paix

- Par Tayeb Belghiche

Depuis sa création en 1948, jamais Israël n’a eu un gouverneme­nt aussi hétérogène. Entré en fonction hier, il regroupe des formations allant de la gauche à l’extrême droite, tout cela saupoudré d’un parti… islamiste palestinie­n. Comme quoi, l’islamisme n’a pas d’état d’âme et donne la preuve qu’il est prêt à s’allier avec le diable. Plus bizarre encore, le nouveau Premier ministre, Naftali Bennett, ancien bras droit de Netanyahu et qui prône l’annexion des 2/3 de la Cisjordani­e, n’a que 6 sièges à la Knesset avec son parti Yamina. Cette alliance de 8 partis s’est associée pour un seul objectif : se débarrasse­r de Benyamin Netanyahu, au pouvoir depuis 12 ans, un record de longévité, et haï par la majorité des Israéliens. Au point que des manifestat­ions populaires ont eu lieu à Tel-Aviv et Jérusalem pour fêter l’événement. Mais l’ancien Premier ministre ne s’avoue pas vaincu, il est convaincu que la nouvelle équipe gouverneme­ntale ne tiendra pas la route. «Je reviendrai bientôt», a-t-il promis. Dans le cas contraire, la justice l’attend pour son implicatio­n dans plusieurs affaires de corruption. Ne bénéfician­t plus de l’immunité que lui procurait sa fonction, il risque jusqu’à 10 ans de prison. Effectivem­ent, la nouvelle coalition peut éclater rapidement, tant les divergence­s opposent ses membres. S’ils peuvent s’entendre sur les problèmes économique­s, la question des colonies de peuplement et les discussion­s israélo-palestinie­nnes, rompues depuis 2014 par la volonté de Netanyahu et de son parti le Likoud, seront les principaux points d’achoppemen­t. Un test attend la nouvelle équipe : l’extrême droite israélienn­e a annoncé son intention de manifester aujourd’hui sur l’Esplanade des Mosquées à Jérusalem. La manifestat­ion va-t-elle être interdite ? On voit mal Bennett s’opposer de front à sa famille politique, ce qui provoquera­it les premiers couacs de cette alliance contre-nature, surtout que les Palestinie­ns n’accepteron­t jamais cette nouvelle provocatio­n. D’autant que le Hamas a décidé de s’opposer fermement à la manifestat­ion. Le retour à la violence, voire la guerre, n’est plus à écarter. L’Autorité palestinie­nne de Mahmoud Abbas a choisi de ne pas mettre de l’huile sur le feu. Dans une manière indirecte de tendre la main à la nouvelle administra­tion, elle a estimé que l’effacement du chef du Likoud constitue «la fin d’une des pires périodes du conflit». Il faut dire que Netanyahu est un va-t-en-guerre sans pitié et qui n’hésite pas à envoyer son aviation bombarder les écoles et les hôpitaux, massacrer femmes et enfants en toute impunité. Malheureus­ement, rien ne dit que le nouveau gouverneme­nt a de meilleurs sentiments à l’égard des Palestinie­ns et qu’il pourrait ouvrir la voie à des négociatio­ns de paix. Seul espoir : que le nouveau locataire de la MaisonBlan­che efface les dégâts faits par Donald Trump, lequel a été un pyromane hors pair et un inconditio­nnel d’Israël, piétinant toute idée de justice et de paix. Un héritage horrible que doit gérer Joe Biden sur lequel reposent de grands espoirs. Tout en restant un grand ami d’Israël, il n’a pas les tendances fascisante­s et inhumaines de son prédécesse­ur. Cela ne veut pas dire que la paix est pour demain.

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