Graves accusations contre un doctorant et un militant associatif
L’enseignant chercheur Hakim Fekir et le militant associatif Farid Belmokhtar sont poursuivis, entre autres, pour «adhésion à une organisation terroriste visant à porter atteinte à la sûreté de l’Etat, à l’unité nationale et à l’intégrité du territoire».
Arrêtés le jour du vote au centre-ville de Naciria alors qu’ils se trouvaient dans un véhicule, l’enseignant chercheur Hakim Fekir et le militant associatif Farid Belmokhtar sont poursuivis, entre autres, pour «adhésion à une organisation terroriste visant à porter atteinte à la sûreté de l’Etat, à l’unité nationale et à l’intégrité du territoire», des faits punis par l’article 87 bis alinéa 3, introduit il y a 15 jours dans le code pénal. Si M. Fekir, doctorant en langue française à l’université de Lyon, a été placé sous contrôle judiciaire par le juge d’instruction près le tribunal de Bordj Menaïel, son ami, lui, a été mis sous mandat de dépôt à la prison de Tidjellabine. Réagissant aux faits qui leur sont reprochés, un des avocats de la défense affirme qu’il «ne suffit pas d’imputer une accusation à un citoyen pour en faire un coupable». Pour Me Affif Chaouch Nacereddine, «la justice doit apporter des preuves irréfutables et inaccessibles pour justifier de tels griefs. A défaut de preuves ainsi définies, l’accusation devient gratuite et dénuée de tout fondement au plan juridique. Dans ce cas, la condamnation constituera une atteinte aux droits de l’homme et met le citoyen dans une situation d’insécurité juridique». Selon lui, «si les faits imputés remontent à une date antérieure à celle de la promulgation de la loi, l’accusation devient nulle et non avenue». «Il n’y a pas d’application rétrospective de la loi, sauf si elle est plus favorable au détenu. L’article 2 du code pénal est clair là-dessus», argue-t-il.
Dans un communiqué rendu public, le Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS/section de Boumerdès) apporte son soutien à M. Fekir, soulignant que celui-ci «incarne l’idéal de l’université et ce qu’elle s’efforce de sauvegarder elle aussi : la rigueur scientifique, le sérieux, ce respect de la discipline...» «Hakim Fekir possède, outre des communications, des publications dans des revues internationales… et participe au rehaussement de son université et de l’image de l’Algérie. Pour toutes ces raisons, laissons-le résider là où se trouve sa place : une salle de cours ou un amphithéâtre ; laissons-le faire ce beau métier de planteur de savoir», a-t-on ajouté dans le communiqué. Son coprévenu Farid Belmokhtar, lui, est un membre de l’association culturelle Tamussni jouissant d’une grande estime auprès de tous les habitants de Naciria. La preuve en est la mobilisation citoyenne qui s’est manifestée à son égard et d’autres détenus d’opinion après son incarcération, témoigne Nabil, un de ses amis. Et d’ajouter : «Farid est un ingénieur qui a consacré toute sa jeunesse au travail associatif et caritatif. Il n’est pas un vendeur de cocaïne pour qu’il soit mis en prison.»
A noter que la localité de Naciria vit dans un climat de vive tension depuis plusieurs semaines à cause des arrestations arbitraires et l’emprisonnement d’une dizaine de jeunes de la région.