«Excessif» !
Poursuites judiciaires et condamnations. Au moins 22 personnes sont poursuivies en justice, dont 18 placées sous mandat de dépôt pour «triche aux épreuves du baccalauréat», qui prendront fin aujourd’hui. Ces chiffres ont été communiqués mardi par le ministère de la Justice, précisant que «trois des mis en cause ont été condamnés à une année d’emprisonnement ferme assortie d’une amende de 100 000 DA en attendant le procès des autres personnes incriminées». Selon la même source, ces cas de triche ont été enregistrés à Tébessa, Ghardaïa, Sétif, Tissemsilt, Chlef, Béchar et Djelfa. Ils concernent, selon la même source, «la diffusion et la fuite de sujets des épreuves du bac par le biais de moyens de communication à distance», qui ont été «détectées par l’Organe national de lutte contre les infractions liées aux TIC». Ces sanctions pénales sont-elles la solution pour cette problématique internationale ? L’emprisonnement des adolescents candidats au baccalauréat n’estil pas trop sévère ? Un débat général sur ces questions s’impose. Mais il n’est toujours pas ouvert, alors que du côté des autorités, le choix est fait : des sanctions pénales pour tenter de «préserver l’intégrité des examens nationaux». L’amendement, en août 2020, du code pénal a durci, en effet, les peines d’emprisonnement contre les personnes impliquées dans la fraude, qui encourent jusqu’à 10 ans de réclusion et une forte amende financière.
Des syndicats de l’éducation nationale et des associations de parents d’élèves commencent à prendre conscience de la gravité de ces sanctions. «C’est excessif et inacceptable d’emprisonner des adolescents pour tentative de fraude ! Le Satef propose de les bannir à vie de l’examen du baccalauréat. C’est déjà une sanction extrême. Même chose pour les candidats libres», affirme Boualem Amoura, secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef). En revanche, précise-t-il, son syndicat est «pour l’emprisonnement des personnes étrangères à l’éducation et qui ’’fuitent’’ les sujets sur les réseaux sociaux». Pour Boualem Amoura, le phénomène de la triche est «devenu un sport national». «La majorité des Algériens trichent ! Les enseignants, les inspecteurs et les juges trichent. Il y a aussi des fraudes massives aux élections ! Il faut une refonte radicale du système éducatif algérien, avec une réforme de l’enseignement secondaire pour mettre en place une nouvelle organisation du baccalauréat et de l’ensemble des examens officiels», préconise-til, insistant sur la nécessité de d’apprendre «aux enfants à ne compter que sur eux-mêmes». Pour sa part, le coordinateur du Cnapeste, Messaoud Boudiba, rappelle que son organisation avait déjà demandé au ministère de l’Education et aux enseignants de «sensibiliser les élèves sur le contenu de la loi de 2020 concernant les fuites des sujets d’examen». Mais, selon lui, «quand il s’agit de la triche à l’intérieur des classes, la seule sanction nécessaire est pédagogique». «La justice ne doit pas intervenir», expliquet-il. Même s’il est favorable à la sanction pour «redonner de la valeur au bac», le président de l’Association des parents d’élèves, Khaled Ahmed, estime que «l’emprisonnement des candidats est sévère». «Les juges doivent prendre en considération le fait que les adolescents, auteurs de tentatives de triche, n’ont pas le même niveau de conscience que les adultes», explique-t-il. Selon lui, c’est tout «le système éducatif qui doit être revu». «Personnellement, je suis contre le maintien des examens de la 5e et du BEM. Il y a même des pays qui ont supprimé le bac, comme la Finlande qui l’a remplacé par un autre système d’évaluation. Il est donc nécessaire de relancer le débat sur les examens de fin d’année», plaide-t-il.