Retour à la case départ
Un changement dans la procédure d’un projet d’envergure, qui n’a pas encore été lancé alors qu’il attend de l’être depuis plusieurs années, était prévisible.
Le retard dans le lancement du mégaprojet algéro-chinois d’exploitation du phosphate risque de s’inscrire dans la durée. En effet, le ministre de l’Energie, Mohamed Arkab, a invité officiellement son «partenaire» chinois Citic à participer à l’avis de manifestation d’intérêt au mégaprojet du phosphate que le groupe Asmidal, filiale de Sonatrach, a lancé dernièrement. Citic a répondu à cet avis la semaine dernière, tout comme trois autres entreprises, chinoises aussi. C’est ce qu’ont confirmé, hier, des sources proches de ce dossier qui a défrayé la chronique. Ce changement dans la procédure d’un projet d’envergure, qui n’a pas encore été lancé alors qu’il attend de l’être depuis plusieurs années, était prévisible. Dans son bilan de réalisation du plan d’actions 2020 arrêté au 31 décembre dernier, le ministère des Mines avait indiqué : «Le Projet Phosphate Intégré (PPI) vise à développer une industrie de transformation des phosphates de Bled El Hedba (Tébessa) pour la production des engrais dans les régions de l’est du pays. Il est actuellement en phase de recherche d’un partenaire technologue potentiel et l’appel à manifestation d’intérêt sera lancé en 2021.» Il intervient après un préalable accord de Sonatrach avec le plus important groupe chinois, Citic en l’occurrence. Selon des observateurs avertis, ce changement peut avoir une seule lecture : limiter la mainmise des Chinois sur un méga projet dont la réalisation nécessite pas moins de six milliards de dollars, dont le financement est assuré à 80% par des banques chinoises. «Ce retard concerne aussi l’entreprise portuaire de Annaba, qui devait être chargée de la réalisation d’au moins un quai, qui sera affecté à l’exportation du phosphate. Bref, c’est un ensemble qui se trouve dans la même situation. Il s’agit de trois complexes à Souk Ahras, Tébessa et Skikda, une station de dessalement d’eau à Guerbès (El Tarf) et le rail entre les wilayas de Tébessa et Annaba», explique une source proche du ministère de l’Industrie et des Mines. Tout avait été entamé le 26 novembre 2018, où un accord de partenariat entre les groupes Sonatrach et Asmidal-Manal, et les groupes chinois Citic et Wengfu, qui a quitté le projet, avait été signé à Tébessa. Ce partenariat portait sur la réalisation d’un projet intégré d’exploitation et de transformation du phosphate et du gaz naturel des gisements de la région de Bled El Hadba. L’accord a été signé par l’ex-PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour (poursuivi en justice), et le PDG de la société Citic, Chen xiaoijia, à la direction de transfert du gaz dans la localité Oglet Ahmed, à 22 km de Bir El Ater, distante de 106 km au sud du chef-lieu de wilaya. Ce projet, qui obéit à la règle 51/49%, est réparti entre le gisement de Bled El Hadba à Tébessa (2045 ha), la plateforme de Oued Kebrit à Souk Ahras (1484 ha), celle de Hadjar Essoud à Skikda (149 ha) et le port de Annaba (42 ha), selon la fiche technique de ce projet. Cet investissement est doté d’une enveloppe de 6 milliards de dollars et créera 3000 postes de travail directs alors que ses chantiers de réalisation à travers les quatre wilayas assureront 14 000 postes d’emploi, selon le même document. Ce complexe de phosphate garantira des revenus en devises à hauteur de 1,9 milliard de dollars/an. Mis en exploitation, sa production devrait atteindre 6 millions de tonnes de phosphate/an et 1,1 million de tonnes d’ammoniac/an, il comprendra le dédoublement de la voie ferrée reliant le site de production au port de Annaba. Jusqu’à aujourd’hui, tous ces chiffres demeurent, malheureusement, théoriques.