Les tractations s’annoncent serrées
● Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, engagera à partir d’aujourd’hui – en prévision de la formation du nouveau gouvernement – des consultations avec les dirigeants des partis politiques et les représentants des indépendants vainqueurs aux élections à la députation de l’Assemblée populaire nationale (APN).
La présidence de la République va entamer à partir d’aujourd’hui «des consultations» en prévision de la formation du nouveau gouvernement. «Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, engagera à partir de samedi 26 juin 2021, en prévision de la formation du nouveau gouvernement, des consultations politiques avec les dirigeants des partis politiques et les représentants des indépendants vainqueurs aux élections à la députation de l’Assemblée populaire nationale (APN), selon l’ordre des résultats définitifs annoncés par le Conseil constitutionnel», a indiqué la Présidence dans un communiqué. Ce dernier a été rendu public, jeudi, juste après l’annonce de la démission du Premier ministre, Abdelaziz Djerad, qui a été chargé, toutefois, de «gérer les affaires courantes jusqu’à la désignation d’un nouveau gouvernement». Bien entendu, il n’y a pas dans la loi de délai imparti pour la constitution d’un nouveau gouvernement après une élection législative. Néanmoins, le chef de l’Etat aura tout intérêt à nommer un nouvel Exécutif dans les échéances les plus courtes. Il est à noter, à cet effet, que la Constitution de 2020 permet au président de la République de nommer un Premier ministre, dans le cas d’une majorité présidentielle (article 105), ou un chef de gouvernement s’il résulte de l’élection «une majorité autre qu’une majorité présidentielle» (article 110). Le chef de l’Exécutif, dans ce cas-là, sera issu de la majorité parlementaire. Le pays est-il aujourd’hui dans cette dernière configuration ? Etant des concepts beaucoup plus politiques sans une «traduction» légale, il suffirait, comme l’a d’ailleurs fait remarquer l’enseignant à l’université de Béjaïa, Ahmed Betatache, que les partis politiques, ainsi que le groupe des indépendants, ayant remporté des sièges aux législatives du 12 juin, expriment leur soutien au programme du chef de l’Etat pour que le Parlement se «prévale» d’une majorité présidentielle, alors que ces entités n’ont pas soutenu Abdelmadjid Tebboune lors de son élection, le 12 décembre 2019.
«GOUVERNEMENT D’UNION NATIONALE» ?
En décidant d’inviter les chefs de ces partis politiques et des représentants des indépendants à des «consultations» en prévision de la constitution du futur Exécutif, le Président compte-t-il nommer un chef de gouvernement parmi ces derniers ? En tout cas, certains d’entre eux ont déjà entamé des discussions en vue de la constitution d’une majorité à l’APN. C’est le cas, notamment, des indépendants qui ont multiplié les réunions au lendemain des élections et qui, d’après certains d’entre eux, se préparent à constituer une majorité soutenant le chef de l’Etat. Occupant la troisième place à l’APN, avec 65 sièges, derrière le FLN et les indépendants, le MSP a indiqué, dans un communiqué, qu’il «entreprendra des consultations avec les composantes de la classe politique ayant pris part ou non aux élections», comme il a appelé les autorités «à un dialogue stratégique et à oeuvrer d’arrache-pied à réaliser le consensus national et former un gouvernement d’union nationale». Bien entendu, il est peu évident aujourd’hui, au vu de l’évolution qu’a connue la scène politique nationale, que le pays se dirige vers cette option de «gouvernement d’union nationale». La Présidence va probablement puiser dans les partis et les indépendants ayant remporté les élections. Pour le poste de Premier ministre (ou de chef de gouvernement), certains noms ont commencé à circuler : comme c’est le cas de Abdelaziz Rahabi, option peu évidente a priori, ou bien Sabri Boukadoum, l’actuel ministre des Affaires étrangères, les deux n’étant pas issus des formations représentées à l’APN. Pour ce qui est de Abdelaziz Djerad, il est presque exclu qu’il soit reconduit à son poste, étant donné que la période de sa gestion a été marquée par plusieurs crises qui, d’ailleurs, n’ont pas encore trouvé de solutions (problème de liquidités, flambée des prix des produits alimentaires, pénurie de lait, huile de table…). Abdelmadjid Tebboune composera-t-il un gouvernement dont les ministres sont issus, entre autres, du FLN et du RND, deux partis classés respectivement premier et quatrième aux législatives du 12 juin, totalisant 156 sièges (38% de la totalité des sièges), ayant été fortement contestées par la population ? Prendra-t-il le risque de nommer un Exécutif qui sera sous les feux de la critique dès son annonce, et ce, sachant déjà que les élections ayant mené à ces résultats n’ont enregistré qu’un taux de participation de 23% ? La mission s’avère ardue. D’autant plus que les problèmes socioéconomiques s’accumulent et s’aggravent, la crise de l’eau n’étant que l’un d’eux. D’ailleurs, dans ce contexte, il serait plus opportun de composer un Exécutif «légitime», qui pourra éventuellement mobiliser toutes les énergies pour faire face aux problèmes à venir. Même si celui-ci sera toujours «handicapé» par le boycott qui a caractérisé les élections législatives du 12 juin. Dans tous les cas de figure, à partir d’aujourd’hui, les Algériens auront une idée plus précise sur les intentions des uns et des autres pour ce qui est de ce futur Exécutif, même s’il est peu évident que les concernés, parmi les chefs de parti et représentants des indépendants qui seront reçus à El Mouradia, soient au courant des objectifs tracés par le locataire de ce dernier.