L’économie au creux de la vague
Le gouvernement tente ainsi de faire feu de tout bois pour combler les déficits budgétaires cumulés depuis années et booster la croissance qui, outre la récession de -4,6% en 2020 (ou plus, selon des institutions internationales), était atonique pendant longtemps.
Desservie par la crise sanitaire mondiale et rattrapée par les errements politiques masqués par l’aisance financière qui l’a dispensée de l’effort à mener des réformes pourtant nécessaires, l’Algérie se voit contrainte de revisiter aujourd’hui tous les chantiers économiques abandonnés dans le sillage de la remontée des cours de pétrole durant la première décennie des années 2000 pour tenter de trouver des financements indispensables au redémarrage de la machine économique. Le gouvernement essaie ainsi de faire feu de tout bois pour combler les déficits budgétaires cumulés depuis années et booster la croissance qui, outre la récession de -4,6% en 2020 (ou plus, selon des institutions internationales), était atonique pendant longtemps. Le gouvernement a usé jusqu’à la corde la planche à billets avant de se rabattre sur d’autres modes de financement qui, selon certains observateurs de la scène économique, confinent aux mêmes résultats. Dans le cadre de la LFC-2021, l’on cherche encore à trouver des financements en recourant à l’emprunt interne et au moyen de capter l’argent de l’informel à travers des obligations du Trésor. Mais en 2019, soit donc juste avant l’apparition de la pandémie de Covid-19, qui a mis à genoux l’économie mondiale, la croissance de l’économie algérienne «a ralenti pour une cinquième année consécutive». Dans une note de conjoncture du Groupe de la Banque mondiale – datant de l’automne 2020 – intitulée «Traverser la pandémie de Covid-19, engager les réformes structurelles», il ressort que l’Algérie a connu un ralentissement de la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel, qui est passé de 1,2% en 2018 à 0,8% en 2019. «Les dépenses de consommation, qui représentent 54% du PIB réel du pays, ont augmenté de 2,0% en 2019 (contre 2,7% en 2018) sous l’effet d’un affaiblissement de la consommation privée (2,1% en 2019 contre 2,8% en 2018) et publique (1,9% en 2019 contre 2,3% en 2018).
RECUL DE L’INVESTISSEMENT
L’investissement, qui représente 36% du PIB réel du pays, a augmenté de 1,0% en 2019 contre 3,1% en 2018, la croissance des investissements publics étant partiellement compensée par la baisse des investissements privés, en partie imputable au gel prolongé des appels d’offres publics, aux arriérés dus au secteur privé et à la baisse de la confiance des entreprises sur fond d’enquêtes judiciaires impliquant des chefs d’entreprises.» En même temps, note la même source, les exportations nettes sont restées relativement inchangées, les exportations et importations de biens et services se contractant respectivement de 6,1% et 6,9% en 2019. La note de conjoncture explique que l’industrie des hydrocarbures, qui représente 25% de l’économie, s’est contractée de 4,9% en 2019, tandis que le segment hors hydrocarbures enregistrait une croissance de 2,4%. Un résultat qui est mis sur le compte de plusieurs années de désinvestissement dans l’exploration et l’exploitation de cette industrie. Ailleurs, dans d’autres secteurs, on n’a pas fait mieux. La contreperformance est pratiquement partout. Que ce soit dans les services, l’agriculture ou la construction, les résultats ont été plus modestes qu’en 2018. La croissance du secteur agricole est passée de 3,5% en 2018 à 2,7% en 2019, et celui de la construction de 5 à 3,9%. «Même si le secteur privé est resté le principal moteur de la croissance économique en 2019, le secteur public a généré plus d’emplois», tel est le constat de la BM, qui souligne : «La contribution du secteur privé à la valeur ajoutée totale du secteur réel, hors hydrocarbures, a atteint 64%, mais n’a généré que 37% des 280 000 emplois nets créés entre septembre 2018 et mai 2019.» Les contributions les plus notables provenaient de l’agriculture (+1,2 point de pourcentage), de la construction (+0,8 pp) ainsi que des transports et communications (+0,7 pp). En matière d’investissement direct étranger (IDE), ledit rapport de conjoncture note : «Le rôle potentiel des IDE dans l’accès au capital, le transfert des connaissances et l’accès aux marchés internationaux est également resté limité, avec une moyenne d’IDE entrants atteignant 0,6% du PIB par an sur la période allant de 2017 à 2019.» La levée de la barrière 51/49 pour l’investissement étranger dans les secteurs dits non stratégiques va-t-elle permettre l’attractivité escomptée ? La question reste posée tant il est vrai qu’il s’agit véritablement de revoir de fond en comble la manière dont sont menés ces dossiers économiques. A commencer par améliorer le cadre macro-économique, qui reste un des obstacles majeurs à ce propos.