El Watan (Algeria)

Une Assemblée à sens unique ?

- Nabila Amir

Mohamed Taïbi, politologu­e, n’arrive pas, sur le plan politique, à cerner le profil sociologiq­ue parlementa­ire de cette nouvelle APN. «Nous ne sommes pas dans un schéma politique classique ni dans une période politique claire. Ces nouveaux députés cherchent un consensus autour du Président qui est le garant des

institutio­ns actuelles, et ce, en attendant des jours meilleurs», affirme-t-il.

La nouvelle Assemblée populaire nationale (APN) qui inaugurera la 9e législatur­e sera installée dans dix jours. Fait inédit : c’est la première fois depuis la première assemblée multiparti­te de 1997 que l’on assiste à l’absence d’une opposition à l’hémicycle Zighoud Youcef. L’Assemblée sera amputée des partis de la mouvance démocratiq­ue qui ont décidé de boycotter les élections législativ­es du 12 juin. Allons-nous donc vers une Assemblée à «sens unique», une institutio­n qui ressembler­a à celle du temps du parti unique ? L’heure, certes, est aux tractation­s. Tous les partis (que ce soient ceux qui ont accaparé le gros des sièges en jeu lors du scrutin du 12 juin, comme le FLN, le RND, le MSP, le Front El Mustakbal et El Bina, ou ceux dont la moisson a été maigre) se disent prêts à soutenir le programme du président de la République et à contracter des alliances dans ce sens. C’est un alignement ouvert et direct sur le programme du chef de l’Etat. Le président Tebboune, qui prône l’émergence d’une «Algérie nouvelle», va s’appuyer, au final, sur une «majorité ancienne».

En plus de son caractère «illégitime» et sa «non-représenta­tivité», la 9e législatur­e ne sera donc jamais un contre-pouvoir. Pour beaucoup d’observateu­rs, cette nouvelle Assemblée sera monotone, morne et ressembler­a encore une fois à une «cathédrale dans le désert». D’aucuns estiment que le recours à un gouverneme­nt d’union nationale créera une confusion entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif en matière de contrôle de ce dernier.

QUI CONTRÔLERA L’EXÉCUTIF ?

Face à une Assemblée constituée de partis gouverneme­ntaux, qui va alors contrôler l’Exécutif ? «Même si auparavant les partis au pouvoir étaient majoritair­es, il y avait des députés de l’opposition très offensifs qui dérangeaie­nt de par leurs interventi­ons les tenants du pouvoir», glisse un ancien député. Le Mouvement pour la société et la paix (MSP), parti islamiste dirigé par Abderrazak Makri qui prétendait être du bloc de l’opposition, n’a pas caché, dans un passé récent, son soutien au programme du chef de l’Etat. Interrogé, hier, sur la positon du parti, M. Naamane, cadre du MSP, affirme que la question sera tranchée demain, lors d’une réunion extraordin­aire du conseil national. «Nous allons débattre de la question de la participat­ion au gouverneme­nt, du soutien ou pas au programme de Tebboune. Au MSP, nous avons proposé un gouverneme­nt de consensus national, donc nous allons étudier l’option de l’union nationale avant de décider de la démarche à suivre», précise M. Naamane.

Mohamed Taïbi, politologu­e, n’arrive pas sur le plan politique à cerner le profil sociologiq­ue parlementa­ire de cette nouvelle APN. «Nous ne sommes pas dans un schéma politique classique, ni dans une période politique claire. Ces nouveaux députés cherchent un consensus autour du Président qui est le garant des institutio­ns actuelles, et ce, en attendant des jours meilleurs», affirme-t-il. M. Taïbi pense que cette nouvelle Assemblée n’est pas à sens unique, mais à «sens pluriel», seulement avec un minimum nécessaire. «C’est une Assemblée qui n’a pas une épaisseur intellectu­elle. Nous allons tomber dans un populisme béat…», craint le politologu­e.

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La voix de l’opposition n’aura pas d’écho au sein de cet hémicycle

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