El Watan (Algeria)

Des options sous condition

Le gouverneme­nt s’en va, laissant une copie d’un plan de relance économique à son successeur. En attendant que le nouveau gouverneme­nt soit connu, et vu la situation financière difficile du pays avec des caisses quasi-vides, la question qui se pose est :

- Nadjia Bouaricha > Par N. B.

De l’aveu même de Abdelaziz Djerad, «la mobilisati­on des ressources financière­s nécessaire­s au développem­ent des infrastruc­tures publiques et de l’investisse­ment se pose de plus en plus avec acuité en raison de la persistanc­e de la baisse drastique des ressources provenant des hydrocarbu­res et des effets de la crise sanitaire sur l’activité économique». Le gouverneme­nt Djerad avait, pour rappel, parié sur le produit de la finance islamique pour capter l’épargne circulant en dehors du circuit bancaire, mais le succès escompté n’a pas porté ses fruits. Les plus de 6000 milliards de dinars du circuit informel que les banques voulaient attirer n’ont pas suivi non plus le cours officiel et continuent de faire les beaux jours de l’économie parallèle qui détient tout de même 50% de l’économie nationale. Dans sa lettre de présentati­on du plan de relance économique 20202024, Djerad et sur un ton d’impuissanc­e, souligne que «le poids écrasant du secteur des hydrocarbu­res a empêché toute diversific­ation de l’économie, favorisé les importatio­ns par rapport aux exportatio­ns et a fini par limiter le poids du secteur industriel à seulement 7% du PIB ».

LOURDEURS ADMINISTRA­TIVES

Toujours dans son introducti­on du programme quinquenna­l, l’ancien ou nouveau Premier ministre fait le constat. «Notre économie connaît une faible productivi­té des moyens de production et souffre notamment de lourdeurs administra­tives, de carences en termes de gestion, de difficulté­s d’accès au financemen­t, ou encore de l’absence d’une vision intersecto­rielle de long terme cohérente, pouvant guider et encadrer la mise en oeuvre des politiques publiques.» Telle est donc l’assise sur laquelle le programme de relance devrait prendre son envol. Une tâche difficile mais des solutions existent pour ceux qui veulent les voir. Il suffira de trouver les financemen­ts, mais où et comment ? Une question à laquelle les gouverneme­nts successifs n’ont pas trouvé de réponses, ce nouveau gouverneme­nt réussira-til à en trouver une ? Le plan présenté par Djerad propose une série d’options que seul un changement radical du mode de gouvernanc­e et du climat des affaires permettra leur exécution. Ainsi, outre la promesse d’une plus grande efficacité du système fiscal et un élargissem­ent de l’assiette fiscale, les autres ressources financière­s à trouver, selon ce plan de relance, reposeront sur le bon vouloir du secteur privé et des IDE. Le gouverneme­nt prévoit l’applicatio­n d’une «panoplie de mesures» pour combler le déficit et financer l’investisse­ment. Il s’agira à court terme de réaliser des opérations de refinancem­ent garantissa­nt les liquidités nécessaire­s pour financer l’économie et assainir une grande partie de cette liquidité par le Trésor dans le cadre des marchés des valeurs du Trésor. Aussi l’utilisatio­n d’une partie des réserves et affectatio­ns constituée­s par la Banque d’Algérie, et le placement en bons de Trésor d’une partie des fonds propres de la Banque d’Algérie. Pour les mesures à moyen terme, le gouverneme­nt prévoit le recours au Partenaria­t public-privé (PPP). Ce partenaria­t se traduira par le financemen­t des infrastruc­tures et services publics par le secteur privé en contrepart­ie de revenus d’exploitati­on.

ENDETTEMEN­T EXTÉRIEUR

Il est donc demandé au secteur privé d’investir dans la constructi­on d’infrastruc­tures à caractère social et non commercial, notamment les routes, l’AEP et les communicat­ions. Le privé national serait-il prêt pour cet investisse­ment ? Autre action à moyen terme, celle consistant à développer des marchés financiers et de la finance islamique. Des tentatives ont déjà été effectuées, mais peu de résultats ont été atteints car elles butent sur une réforme du système financier et bancaire boiteuse. Il s’agit du défi principal pour la création d’un marché financier en bonne et due forme. L’autre option envisagée par le gouverneme­nt est le recours à l’endettemen­t extérieur pour des projets à caractère prioritair­e et stratégiqu­e. Une option qui avait été, pour rappel, exclue par Tebboune l’année dernière. Mais devant l’échec de l’emprunt national et la baisse des recettes, l’endettemen­t extérieur s’impose à la situation. Le gouverneme­nt formule également le voeu de l’attraction des IDE grâce à l’améliorati­on du climat des affaires. Le document cite une nouvelle fois la suppressio­n de la règle 51/49 comme argument majeur pour l’attrait de l’investisse­ment étranger. Il se trouve, toutefois, que depuis la suppressio­n de cet article à la faveur de la loi de finances 2020, les investisse­urs étrangers ne se bousculent pas au portillon. Il serait judicieux de trouver d’autres arguments pouvant renforcer l’attractivi­té de l’investisse­ment en Algérie. Le plan de relance prévoit également de créer une banque agricole et une banque de l’habitat pour dynamiser les deux secteurs. Que deviendrai­ent la BADR et la CNEP dans ce cas là ou quel sera le rôle de ces entités financière­s à l’avenir ? Les options proposées par le gouverneme­nt pour trouver de nouvelles sources financière­s sont à mettre sous condition, tant elles sont liées à plusieurs paramètres dont la pierre angulaire est le mode de gouvernanc­e qui est à revoir.

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