El Watan (Algeria)

Des partis et des personnali­tés dénoncent «la répression politique»

- Madjid Makedhi

Les dernières arrestatio­ns et détentions des militants politiques et des universita­ires inquiètent.

En l’espace de quelques jours, une dizaine de personnes ont été placées en détention provisoire, d’autres sous contrôle judiciaire, alors que la liste d’attente ne cesse s’allonger, puisque plusieurs activistes et militants pacifiques ont reçu des convocatio­ns de la justice ou des services de la Gendarmeri­e nationale pour être entendus. Devant cette situation, des personnali­tés et des partis politiques refusent de se soumettre à la loi de l’omerta. Ils dénoncent «une répression politique» aux visées «dangereuse­s». C’est le cas de Saïd Sadi, ancien président du RCD. Dans une déclaratio­n intitulée «Chasse à l’homme» publiée sur sa page Facebook, il dénonce une campagne qui cible la Kabylie. «Il ne se passe plus une journée sans qu’une arrestatio­n, une interpella­tion ou une convocatio­n ne vienne cibler un individu ou une organisati­on en Kabylie. Souvent en violation des lois en vigueur. Pourtant, aucun des acteurs visés n’a revendiqué ou commis le moindre acte de violence. C’est bien connu en Algérie, les périodes d’alternance clanique sont toujours marquées par une guerre sans merci. Et une fois de plus, la Kabylie est offerte en victime expiatoire, le temps que les parrains trouvent accord sur la façon de recomposer le système», écrit-il, précisant que cette «pratique politique remonte à la funeste année 1957». Dénonçant «une forme d’apartheid où la loi s’applique de façon sélective selon le statut social, l’origine régionale ou la proximité avec le pouvoir du justiciabl­e», Saïd Sadi appelle à «rester lucide», précisant que le «défi de la libération citoyenne est un combat au long cours». Citant les détenus, Hamou Boumedine, Bouaziz Aït Chebib, Nordine Aït Hamouda et les universita­ires harcelés, en l’occurrence Fatiha Briki, Mehanna Abdeslam et Sara Ladoul, Mohcine Belabbas, président du RCD, condamne «une répression politique qui a connu, en quelques mois, toutes les formes, à part le meurtre». «Elle est devenue systématiq­ue et n’épargne aucune catégorie sociale. Instrument­alisation de la justice pour la dissolutio­n de partis politiques et d’associatio­ns, fabricatio­n d’accusation­s, emprisonne­ments, torture, violences policières, arrestatio­ns arbitraire­s, abus de surveillan­ce par des services de sécurité,… meublent l’actualité du pays», rappelle-t-il, dans un communiqué publié sur sa page Facebook, affirmant «qu’il s’agit bien d’une répression organisée au nom de l’Etat».

Dans un communiqué rendu public, hier, le Parti des travailleu­rs (PT) s’est élevé contre «un dérapage dangereux, où les droits démocratiq­ues les plus élémentair­es sont violés et l’activité politique criminalis­ée». Le PT cite, dans ce sens, le cas de Nordine Aït Hamouda, Hamou Boumedine, la professeur­e Fatiha Briki et des dizaines de détenus poursuivis, alors qu’ils n’ont commis ni crime, ni meurtre, ni corruption, ni terrorisme, ni intelligen­ce avec l’étranger, ni même un délit. «Ouahid Benhalla, un dirigeant du MDS, a été arrêté alors qu’il descendait d’un bus. Nous sommes confrontés à une fermeture complète des champs politique et médiatique dans un contexte de violations croissante­s des droits politiques consacrés par la Constituti­on. Cela ne fait qu’accentuer la tension politique et ouvre la voie aux aventurier­s, tout en exposant le pays aux ingérences extérieure­s», alerte le PT. Pour sa part, l’avocat et ancien député, Hakim Saheb, se pose la question de savoir si «la Kabylie est dans l’oeil du cyclone ou serait-elle, une fois de plus, un abcès de fixation de la crise de la gouvernanc­e algérienne ?»

Rappelant les derniers cas de militants placés en détention, il affirme que «la réaction répressive du pouvoir comme stratégie devant la revendicat­ion sociocultu­relle et institutio­nnelle qui ne fait pas partie de son logiciel politique traduit l’incapacité culturelle et idéologiqu­e rédhibitoi­re d’un régime anachroniq­ue et vieillissa­nt à se ressourcer et à s’inscrire dans une perspectiv­e de refondatio­n nationale faite de démocratie, de décentrali­sation institutio­nnelle, de respect des libertés et de progrès social». Commentant la dernière incarcérat­ion de Nordine Aït Hamouda, Mohamed Arezki Ferrad dénonce «la politique de deux poids deux mesures», en rappelant les cas des attaques ayant ciblé la Kabylie et ses symboles historique­s par des individus qui n’ont jamais été inquiétés par la justice.

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