Assassinat du président Jovenel Moïse
• Durant son règne, Jovenel Moïse aura nommé pas moins de sept Premiers ministres. Le dernier en date, Ariel Henry, n’aura pas pu entrer en fonction.
Le président haïtien, Jovenel Moïse, a été assassiné par un commando armé hier en pleine nuit dans son domicile, a annoncé le Premier ministre par intérim, Claude Joseph, cité par l’AFP. «Le Président a été assassiné chez lui par des étrangers qui parlaient l’anglais et l’espagnol (…)», a-t-il affirmé. Un peu plus tard, il a décrété l’état de siège. «Nous avons décidé de déclarer l’état de siège dans tout le pays», a déclaré Claude Joseph dans un discours. Plus tôt, il avait annoncé hier l’attaque ayant causé la mort du Président Jovenel Moïse. Le président américain, Joe Biden, a condamné cet «acte odieux», disant que les Etats-Unis sont prêts à apporter leur aide au pays en crise. L’Union européenne s’est inquiétée d’une «spirale de violence» par la voix de son chef de la diplomatie, Josep Borrell, et Paris a dénoncé un «lâche assassinat». Le Conseil de sécurité des Nations unies s’est dit «profondément choqué» par cet assassinat. De son côté, la République dominicaine a ordonné la «fermeture immédiate» de sa frontière avec Haïti. Ancienne colonie espagnole, puis française, située dans les Caraïbes en Amérique, Haïti est devenue la première République noire indépendante en 1804 après une révolte des esclaves menée par Toussaint Louverture. De 1957 à 1986, François Duvalier dit Papa Doc, puis son fils Jean-Claude Baby Doc imposent la dictature incarnée par les escadrons de la mort, les Tontons Macoutes.
En 1990, le prêtre Jean-Bertrand Aristide est élu président à la première consultation libre. Renversé par un coup d’Etat en 1991, il s’exile, puis regagne Haïti en 1994 après une intervention américaine. Un de ses proches, René Préval, prend la Présidence en 1996. Jean-Bertrand Aristide redevient Président en 2001. Sous pressions américaine, française et canadienne, d’une insurrection armée et d’une révolte populaire, il démissionne en 2004. René Préval, revenu au pouvoir en 2006, est le seul dirigeant haïtien à avoir achevé ses deux mandats autorisés par la Constitution. Elu en 2011, Michel Martelly rétablit en 2015 les forces armées de Haïti. Le 7 février 2016, il finit son mandat sans successeur, après l’annulation du premier tour de la présidentielle d’octobre 2015 en raison de contestations et de fraudes massives.
Le Parlement désigne alors le président du Sénat, Jocelerme Privert, comme président provisoire. Après une longue crise électorale, l’élection de l’homme d’affaires Jovenel Moïse lors d’un nouveau scrutin en novembre 2016 est confirmée en janvier 2017. Dès son investiture en février, il est confronté à la colère de l’opposition, qui ne reconnaît pas sa victoire. En 2018, l’augmentation du prix des carburants déclenche trois jours d’émeutes.
Après l’expiration en janvier 2020 du mandat des députés sans nouvelles élections, le Président gouverne par décret. Des manifestations se multiplient pour dénoncer l’insécurité, notamment les enlèvements contre rançon. Le 7 février 2021, le conseil supérieur du pouvoir judiciaire décrète la fin immédiate du mandat présidentiel. Jovenel Moïse maintient qu’il lui reste un an au pouvoir, compte tenu de l’annulation de l’élection de 2015. Le même jour, les autorités annoncent l’échec d’un projet de coup d’Etat visant le Président, qui soutient avoir échappé à une tentative d’assassinat. En mars, l’Exécutif décrète l’état d’urgence pour rétablir l’autorité de l’Etat dans des zones contrôlées par des gangs. Un référendum constitutionnel prévu fin juin, largement contesté, est reporté sine die en raison de la pandémie de coronavirus.
Durant son règne Jovenel Moïse aura nommé pas moins de sept Premiers ministres. Le dernier en date, Ariel Henry, n’aura pas pu entrer en fonction.
Il a été nommé lundi avec pour mission la tenue d’élections législatives et présidentielle libres. Haïti est le pays le plus pauvre de l’Amérique latine et des Caraïbes et l’un des plus pauvres au monde, selon la Banque mondiale (BM), avec 60% de sa population sous le seuil de pauvreté. Il est classé 170e sur 189 par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) pour son indice de développement humain.